Asher Cohen s'étend relativement longuement sur cette situation (persécutions et sauvetages, pp.491-496). Il mentionne l'interprétation de Brenner, plus tard reprise par Klarsfeld: répugnance de la préfecture de Police à effectuer de nouvelles rafles et certitude, de la part de dirigeants SS comme Knochen que la population parisienne aurait réagi avec hostilité à une opération de cette nature.
Commentaire de Cohen:
« Cette seule explication ne nous convainc pas, quand nous réalisons qu'en même temps la police française a pourchassé les résistants avec une férocité sans précédent et sans se soucier de l'opinion publique. On pourrait aussi penser que, compte tenu des priorités et du manque de personnel des forces policières, françaises et allemandes, la déportation des Juifs n'était plus le premier souci. Mais alors pourquoi tant d'insistance sur les arrestations dans les autres villes, où les « résultats » étaient forcément maigres ? Et pourquoi tant d'insistance encore sur la rafle des enfants et leur déportation peu de temps avant que l'armée quitte Paris... On ne peut nier qu'aussi bien l'explication de Brenner, le contemporain que celle de Klarsfeld, l'historien, comportent beaucoup de bon sens et de vérité, mais elles ne semblent pas suffisantes pour répondre à toutes les questions qui se posent. Peut-être n'y-a-t-il pas d'explication, ou du moins aucune qui présuppose une politique réfléchie, coordonnée et bien administrée, dans les derniers mois de l'occupation. »
Plus haut (p.479-481), Cohen avait déjà évoqué cette situation, avec les 40000 à 50000 juifs résidant à Paris, en notant que les services français, CGQJ et PQJ poursuivait la chasse aux immigrés: « on rafla les Argentins, les Polonais, les Turcs, les malades à l'hôpital Totschild et les enfants dans les homes de l'UGIF, mais pas les Français, ni les Juifs travaillant pour les Allemands. Pendant le premier trimestre 1944, 2000 personnes, surtout de pauvres gens des quartiers du Nord et de l'Est furent arrêtées et conduites à Drancy... » et plus bas, « A partir d'avril 1944, les SS opérèrent de plus en plus d'arrestations de juifs avec l'aide de la Milice et de collaborateurs sous leurs ordres. Les contacts avec Vichy étaient rares. D'une façon générale, l'utilisation des informateurs devint l'un des moyens les plus répandus pour découvrir les Juifs qui résistaient aux rafles sous de fausses identités... » Suit un commentaire sur la rémunération de ces informateurs.
Emmanuel |