Bonjour,
Même si l'assassinat de Georges Mandel fut commandité par Hitler, c'est bien Pétain qui fit arrêter Mandel; c'est bien Pétain qui le condamna et le fit incarcérer; c'est bien Pétain qui le livra aux Allemands. C'est bien la Milice, les tueurs à gages du régime, qui se chargea de l'assassiner.
Une lettre de la fille de Mandel, datée du 24 juillet 1944, en témoigne [*] :
********** Monsieur le Maréchal,
Je suis une petite fille de France et, malgré mon jeune âge, je tiens à faire auprès de vous un résumé d'un peu de son histoire.
Je m'appelle Claude Georges-Mandel et j'ai suivi mon père, pas à pas, dans le martyrologue que vous lui avez imposé pendant plus de quatre ans.
J'étais à Bordeaux, le 17 juin 1940, lorsque vous l'avez fait arrêter, quelques heures après votre arrivée au pouvoir, pour vous en excuser ensuite.
J'étais en Afrique du Nord, quand vous l'avez fait traduire devant le Justice militaire dans l'espoir, sans doute, qu'il sera fusillé.
Je l'ai suivi à Chazeron où, malgré son non-lieu, vous l'avez fait incarcérer dans son ignoble réduit de Pellevoisin.
A Vals dont le geôlier-chef Courrier s'est montré un valet si raffiné de vos consignes que vous l'avez décoré de la Légion d'honneur.
J'ai encore dans l'oreille votre voix condamnant, de votre propre autorité, mon père dans la forteresse du Portalet, pour présomptions … et je suis allée au Portalet.
Je n'ignore pas qu'aucun juge ne s'est jamais présenté devant lui pour lui poser une seule question, faute d'éléments pour un interrogatoire.
Mais j'ai dû le quitter quand vous l'avez livré à l'ennemi, fait inconnu dans l'histoire d'aucun peuple.
Aujourd'hui que les événements ont parlé et ne lui donnent que trop raison, vous le réclamez à l'Allemagne, vous le faites revenir en France; ceux dont vous êtes le Chef suprême, ceux qui vous prêtent serment, s'emparent de sa personne désarmée et l'assassinent au coin d'un bois.
Votre justice a passé et fait de moi une orpheline.
Mais, pour le repos de votre conscience, je viens vous dire, Monsieur le Maréchal, que je ne vous en veux pas.
Le nom que j'ai l'immense bonheur de porter, vous l'aurez immortalisé; grâce à vous, il brillera dans l'Histoire comme un flambeau.
Car il n'évoquera ce nom, ni capitulation, ni trahison envers les Alliés, ni soumission à l'ennemi, ni tous les mensonges d'une équivoque qui nous a fait tant de mal.
Il servira d'exemple à la France et l'aidera à se retrouver bientôt : dans le chemin de l'honneur et de la dignité.
Aussi je suis fière de vous signer
CLAUDE GEORGES-MANDEL,
Hôtel de France à Pau. **********
[*] J'ignore si cette lettre a été reproduite dans le livre de François Delpla. Elle fut saisie dans les caisses de Pétain et figurait au dossier d'instruction du procès (source : Louis Noguères, Le véritable procès du Maréchal Pétain).
Bien cordialement,
Francis. |