Bonjour,
Concernant l'appréciation générale de Frenay sur Giraud qui se trouve alors encore en France et vient de rencontrer Laval qui avait tenté de persuader l'évadé célèbre de se rendre aux Allemands, l'Américain David Schoenbrun dans "Les soldats du silence" rapporte le fait suivant :
" A Lyon, Henri Frenay se demandait quelles étaient les intentions de Giraud. Afin de l'apprendre, il lui envoya François de Menthon, qui rapporta de l'entrevue une "triste impression". "L'homme est incontestablement anti-allemand... mais respectueux vis-à-vis du Maréchal déclara Menthon, et il manifeste une suffisance confinant à la sottise". Pour en avoir le coeur net, Frenay chargea Claude Bourdet, un des ses principaux adjoints, de rencontrer lui aussi l'évadé de la forteresse allemande. A son retour, Bourdet fit à son chef un rapport que Frenay reproduit dans ses Mémoires : "(...) Il doit disposer d'appuis importants, probablement américains (bien vu), qui lui donnent beaucoup d'assurance. De la Résistance, il connaît peu de choses... et ne désire pas avoir de contact avec de Gaulle... (en conclusion) cet honorable général me semble absolument imperméable au raisonnement politique."
P. 220.
On se rend compte que le patron de Combat est un chef de mouvement plutôt avisé qui prend le temps de sonder tout nouvel arrivant - alors sans esprit partisan - dans le jeu politico-militaire afin d'en connaître le potentiel pour des alliances temporaires éventuelles. Mais il écarte toute entente avec Giraud car, si le militaire est indéniablement courageux, il est complètement à côté de la plaque politiquement parlant; de plus, il apparaitra bientôt qu'il est manipulé par les Alliés afin de contrer les projets de De Gaulle.
Ce livre de Schoenbrun mériterait une réédition. Son auteur fut un acteur-témoin, entre autres événements, des mille et un complots qui frémissaient dans Alger entre novembre 1942 et novembre 1943.
"Officier de renseignement et correspondant de guerre, David Schoenbrun assisté aux opérations de la Résistance et a participé à la libération de plusieurs villes françaises." (4e de couverture)
Il poursuivit après la SGM une carrière de correspondant en France pour CBS-News et devint un conférencier apprécié à la "New School for Social Research". (Croix de guerre et Légion d'Honneur)
Son essai est une étude générale de la Résistance en France et en Algérie, de 1940 à la Libération. Elle fourmille d'informations et offre le point de vue d'un Américain qui s'efforce de rapporter sans esprit partisan l'histoire et les conflits des mouvements et réseaux de l'armée des ombres et les rapports entre la France occupée et l'Algérie après le débarquement américain.
Cordialement,
René Claude |