Il y en eu pas mal de ces Conventions... - Le Fantôme de Staline - forum "Livres de guerre"
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Le Fantôme de Staline / Vladimir Fédorovski

 

Il y en eu pas mal de ces Conventions... de Christian Favre le mardi 27 octobre 2009 à 18h29

J'ai retrouvé ce texte dans le livre du Dr Marcel Junod, délégué du CICR, en Ethiopie, en Espagne et pendant toute la Seconde Guerre Mondiale.

p. 158
Dans les premiers jours de septembre 1939 une lettre du CICR m'appelle d'urgence à Genève. Dégagé de mes obligations militaires, je me suis mis à la disposition du Comité.
Celui-ci se retrouve une nouvelle fois dans la petite «Villa Moynier», mesurant le rôle écrasant qui va échoir au cours de cette seconde guerre mondiale, que l'on peut aussi appeler la première guerre totale.
L'invasion de la Pologne par les Allemands et par les Russes, l'entrée en guerre de la France et de l'Angleterre, moralement soutenues par l'Amérique, les combats qui se poursuivent depuis six ans entre la Chine et le Japon et qui bientôt embraseront le Pacifique, tout cela fait prévoir que les nations de la terre entière seront finalement engagées dans ce gigantesque conflit... Mais nous savons aussi que les moyens de destruction ont fait depuis vingt ans des progrès terrifiants, qu'ils en feront encore et de plus redoutables dans l'acharnement désespéré de la lutte... Nous savons enfin que cette guerre qui commence et dont nul ne peut prévoir la fin n'épargnera pas les non-combattants, qu'elle les soumettra au contraire à de terribles contraintes, inspirées, exaspérées par le déchaînement de passion que comporte toute guerre idéologique: inquisitions policières, camps d'internement, enrôlements forcés, spoliations et rigueurs collectives...
Contre cette explosion de violence qui, de proche en proche, va se répandre à travers le monde, de quelles armes, de quels moyens dispose la Cause strictement humanitaire que nous sommes appelés à servir?
De rien d'autre que de ces deux Conventions dont nous avons fait l'expérience en Abyssinie et en Espagne, elles datent de 1929 et concernent, l'une la protection des blessés sur le champ de bataille, l'autre celle des prisonniers de guerre.
Car il serait vain, n'est-ce-pas, de compter sur l’efficacité des Actes antérieurs à la première guerre mondiale, ou même, parfois, à la guerre franco-allemande de 1870?Ce n'est pas sans une amère tristesse que l'on peut lire dans ce petit Mémento des Conventions internationales que le Gouvernement fédéral de la Suisse vient de faire rééditer en 1939, la fameuse déclaration de Saint-Pétersbourg signée le 11 décembre 1868 par toutes les nations civilisées:
« Considérant que les progrès de la civilisation doivent avoir pour effet d'atténuer autant que possible les calaamités de la guerre;
«Que le seul but légitime que les Etats doivent se proposer durant la guerre est l'affaiblissement des forces militaires de l'ennemi;
«Qu'à cet effet, il suffit de mettre hors de combat le plus grand nombre d'hommes possible;
«Que ce but serait dépassé par l'emploi d'armes qui graveraient inutilement les souffrances des hommes mis hors de combat ou rendraient leur mort inévitable... »
Et plus loin:
«Les parties contractantes se réservent de s'entendre ultérieurement, toutes les fois qu'une proposition précise serait formulée en vue des perfectionnements à venir que la science pourrait apporter dans l'armement des troupes, afin de maintenir les principes qu'elles ont posés et de concilier les nécessités de la guerre avec les lois de l'humanité.»
Les trois Déclarations de La Haye de 1899 et de 1907 débutent chacune par ces mots: «s'inspirant des sentiments qui ont trouvé leur expression dans la Déclaration de Saint-Péterrbourg...» L'une interdit «de lancer des projectiles et des explosifs du haut de ballons ou par d'autres modes analogues nouveaux». Les deux autres condamnent l'emploi de gaz asphyxiants ou de balles «dum-dum...» Il serait puéril de croire qu'elles seront respectées par les porteurs de lance-flammes ou les escadrilles de bombardiers.
Pareillement il faut ranger parmi les documents du passé - et peut-être aussi les illusions les plus fugitives - cet admirable Règlement des Lois et Coutumes de la Guerre datant de 1907 et qui, théoriquement, est toujours en vigueur:«Art. 25. - II est interdit d'attaquer ou de bombarder par quelque moyen que ce soit, des villes, villages, habitations ou bâtiments qui ne sont pas défendus...»
«Art. 46. - Dans un territoire occupé, l'honneur et les droits de la famille, la vie des individus et la propriété privée, ainsi que les convictions religieuses et l'exercice des cultes doivent être respectés...»
Que reste-t-il de ces intentions généreuses dont le principe était solennellement édicté par ces mots: Les belligérants n'ont pas un droit illimité quant au choix des moyens de nuire à l'ennemi? N'avait-on pas été assez fier de formuler ainsi les conceptions les plus opposées à l'ancien Droit de la guerre, tel qu'il était encore admis à la fin du XIXe siècle...
Depuis la guerre mondiale, les représentants de toutes les nations se sont dix fois réunis pour adapter ces limitations humanitaires aux progrès croissants de la technique moderne, mais ils ne se sont jamais mis d’accord.
Une réglementation de la guerre aérienne, présentée en 1923 à La Haye, est restée à l'état de projet. La Conférence du Désarmement réunie par la Société des Nations n'a pas abouti.
A Genève, en 1929, le CICR proposait deux conventions. La première était une modification de celle de 1906, pour l'amélioration du sort des malades et des blessés des armées en campagne. Présentée à 52 Etats elle fut pratiquement ratifiée dans les années suivantes par presque tous les Gouvernements du monde.
La deuxième était née de la première guerre mondiale. Elle était relative au traitement des prisonniers de guerre et fut présentée à 48 Etats. Mais en 1939, alors que 36 Gouvernements l'avaient ratifiée, d’autres s'abstenaient encore d'y adhérer, notamment ceux de deux grands pays: l'U.R.S.S. et le Japon...Que va-t-il advenir des habitants des villes écrasées sous les intenses bombardements aériens dont la Pologne nous donne déjà l'exemple? Que va-t-il advenir surtout de la population des pays occupés, livrés sans aucne protection, sans la garantie d'aucune convention, à l'exigence de son vainqueur?
Ce problème n'est pas nouveau. Le CICR a essayé - peut-être trop modestement - de faire comprendre ce péril à ceux qui, demain, souffriront si cruellement de l’abandon où ils seront laissés. A Tokyo, en 1934, toutes les nations du monde, réunies par la Conférence internationale des Croix-Rouges, ont pris connaissance de son grand projet de protection des civils, qu'ils soient bombardés, internés, et même déportés. Mais depuis cette date, aucun Gouvernement n'en a proposé la ratification.
ar qui n'appartient plus au monde que par sa souffrance :o son dénuement.
L'expérience de la guerre d'Espagne aurait pourtant dû servir. Ses destructions aveugles, ses exécurions sommaires, ses fusillades, ses persécutions de classes et de religion, ses hécatombes de prisonniers politiques, ont été l'avertissement des atrocités qui se préparent. J'ai devant les yeux les cadavres d'enfants de Barcelone; je revois Bilbao, ses maisons écroulées, la foule hurlante cherchant à couler dans le port les bateaux chargés d'otages...
Je revois aussi ces misérables toucouls d'Ethiopie volatilisées sous les bombes. Dessié réduite en cendres, les squelettes errant sur les pistes de Sidamo, les plaines de Kworam inondées d'ypérite, et ces milliers d'hommes tendant vers l'Empereur leurs membres rongés de plaies saignantes... Abiet... Abiet... Abiet.
Tout cela sera dépassé demain, décuplé, centuplé... Nous le savons, et nous pourrions être atterrés de notre mission.
Pas un mot de découragement ne vient cependant sur les lèvres du Président Max Huber qui réunir les délégués du CICR, nous explique notre tâche, montre, dans chacun des pays belligérants où nous allons être envoyés, ce que nous pouvons, et nous devons tenter.. .
Nos armes: deux Conventions.
Nos moyens? Il n'y a, dans cette petite «Villa Moynier», qu'une poignée d'hommes dévoués, nos secrétaires, cinq dactylos... A la banque, 120.000 francs suisses.
Mais, plus que jamais, cet esprit, dont je sais maintenant ce qu'il peut faire, ce qu'il peut obtenir quand aucun droit ne parle pour un homme qui souffre et qui appartient plus au monde que par la souffrance et son dénuement

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