| | | | La description du livre
| | La Seconde Guerre mondiale - T.1 et 2 / Hans Adolf Jacobsen Discours de Molotov du 31 octobre 1939 de Francis Deleu le lundi 16 juin 2008 à 13h34Bonjour,
Alors que le débat fait rage, ici et ailleurs, sur les buts de guerre de l'Union soviétique, de longs extraits du discours du ministre soviétique des Affaires étrangères Molotov au sujet de la politique extérieure soviétique, prononcé à l'occasion de la cinquième session (extraordinaire) du Soviet suprême, le 31 octobre I939, pourraient alimenter notre réflexion.
Ce discours de Molotov se situe dans le contexte du pacte germano-soviétique, de l'annexion de la Pologne et des pays baltes, des "négociations" finlando-soviétiques.... ou la stratégie du communisme mondial dans la phase de la collaboration avec l'Allemagne nazie. *** Durant les deux derniers mois, d'importants changements sont intervenus. Cela concerne l'Europe, mais aussi les pays très éloignés de ses frontières. En liaison avec cette situation, nous devons ne pas perdre de vue trois éléments fondamentaux dont la signification est décisive. Le pacte de non-agression conclu le 23 août avec l' Allemagne a mis fin aux années de relations anormales qui ont existé entre l'Union soviétique et ce pays. Au lieu de se manifester de l'hostilité, ce qui fut entretenu par certaines puissances européennes de toutes les façons, nous nous sommes entendus et nous avons décidé d'avoir à l'avenir des rapports amicaux.
Cette soudaine amélioration des relations s'est concrétisée par la signature, le 28 septembre à Moscou, d'un pacte d'amitié et d'un accord sur les frontières germano-soviétiques. Ce changement radical dans les relations entre les deux plus grands pays d'Europe devait forcément influer sur l'ensemble de la situation internationale. De plus, les événements ont totalement confirmé les avis qui furent donnés à l'occasion de la dernière session du Soviet suprême au sujet de l'entente germano-soviétique.
Ensuite, il nous faut évoquer le fait de l'écrasement militaire de la Pologne et de l'effondrement de l'Etat polonais. Souvent et à grands cris, les cercles dirigeants polonais se sont vantés de la "stabilité" de leur État et de la "puissance" de leur armée. Et pourtant deux coups rapides, le premier porté par la Wehrmacht allemande, le second par l'armée rouge, suffirent pour que rien ne subsiste de la Pologne, ce produit pas très beau du traité de Versailles, qui avait eu pour résultat l'asservissement de toutes les nationalités non polonaises établies sur son territoire. La "politique traditionnelle" de manoeuvre entre l'Allemagne et l'U.R.S.S. et l'habitude de les jouer l'une contre l'autre se sont révélées insensées et ont mené à la débâcle complète.
Finalement, il nous faut reconnaître que la Grande Guerre qui a éclaté en Europe a entraîné des modifications fondamentales dans l'ensemble de la situation internationale. Cette guerre a commencé en tant que conflit entre l'Allemagne et la Pologne et s'est développée en une guerre entre l'Allemagne d'une part, la France et la Grande-Bretagne de l'autre. Grâce à la déconfiture absolue du commandement polonais, la guerre entre l'Allemagne et la Pologne se termina rapidement. Comme on a pu s'en rendre compte, ni les garanties britanniques ni les garanties françaises ne vinrent en aide à la Pologne. En réalité, personne ne sait encore jusqu'à présent en quoi elles consistaient. La guerre entre l'Allemagne et le bloc franco-britannique ne se trouve qu'à ses débuts et ne s'est pas encore complètement développée. Et pourtant il est manifeste qu'une telle guerre provoquera des modifications radicales de la situation de l'Europe, et pas uniquement de l'Europe.
Eu égard à ces modifications significatives de la situation internationale, nous constatons qu'un certain nombre de slogans anciens, dont nous nous servions encore il y a peu de temps et qui chez beaucoup sont devenus le fait de l'habitude, sont aujourd'hui manifestement dépassés et ne sauraient plus servir. Nous devons nous rendre à l'évidence, car c'est ainsi seulement que nous pourrons éviter des erreurs monumentales dans l'appréciation de la nouvelle situation politique qui s'est développée en Europe. Nous savons par exemple que, durant les mois passés, des concepts comme "agression" et "agresseur" ont pris un nouveau sens concret, une nouvelle signification. Il semble évident que nous ne saurions plus utiliser ces concepts dans le même sens qu'il y a disons trois ou quatre mois. Aujourd'hui, l'Allemagne prend dans le cadre des grandes puissances européennes la position d'un État qui tend à terminer la guerre aussi vite que possible et à rétablir la paix, alors que la Grande-Bretagne et la France, qui hier encore fulminaient contre l'agression, sont partisantes de la poursuite de la guerre et contre la conclusion de la paix. Les rôles se renversent, nous le voyons.
Les efforts des gouvernements britannique et français pour justifier leur nouvelle position par leurs engagements vis-à-vis de la Pologne, sont naturellement insensés. Chacun comprend qu'un rétablissement de l'ancienne Pologne n'entre pas en ligne de compte. Il est donc absurde de poursuivre cette guerre sous le prétexte du rétablissement de l'ancien État polonais.
Quoique les gouvernements de Grande-Bretagne et de France soient conscients de cela, ils ne souhaitent ni la fin de la guerre ni la conclusion de la paix, mais recherchent de nouveaux prétextes pour la poursuite des hostilités contre l'Allemagne. Les cercles dirigeants de Grande-Bretagne et de France ont essayé ces derniers temps de se faire passer pour les défenseurs des droits démocratiques des nations contre l'hitlérisme et le gouvernement britannique a proclamé que son but dans la guerre contre l'Allemagne ne serait rien moins que "l'anéantissement de l'hitlérisme". Cela signifie en fin de compte que les partisans britanniques et avec eux les partisans français de la guerre ont déclaré à l'Allemagne une sorte de guerre "idéologique", qui fait penser aux guerres de religion, d'époques depuis longtemps révolues. Quoi qu'il en soit, c'est sous la bannière "idéologique" qu'a commencé une guerre qui prendra encore d'autres dimensions et qui recèle d'autres dangers encore pour les peuples d'Europe et du monde entier. Et pourtant, il n'existe aucune justification pour une telle guerre. On peut, soit accepter, soit rejeter l'idéologie nationale-socialiste comme tout autre système idéologique; c'est une question d'opinion politique. Mais chacun devrait reconnaître qu'une idéologie ne peut se détruire par la force, ni être éliminée par la guerre. De ce fait, il est non seulement dénué de sens, mais même criminel de mener une telle guerre dans le but de "détruire l'hitlérisme", camouflé sous le prétexte de défense de la "démocratie" ...
La vraie raison de la guerre anglo-française contre l'Allemagne ne réside pas en ce que la Grande-Bretagne et la France ont décidé de reconstituer l'ancienne Pologne et il n'est, naturellement, pas vrai qu'elles ont décidé de lutter pour la démocratie. Les cercles dirigeants de Grande-Bretagne et de France ont certainement d'autres raisons soigneusement tenues secrètes pour une guerre contre l'Allemagne. Mais ces motifs ne s'appuient sur aucune idéologie, mais sur leurs sordides intérêts de puissances coloniales...
Ainsi le caractère impérialiste de cette guerre est manifeste pour celui qui examine les faits sans idée préconçue et qui ne ferme pas les yeux à la réalité. De tout cela, on peut comprendre qui est intéressé à cette guerre, chez qui il y va de la suprématie mondiale. Certainement pas la classe ouvrière. Pour elle, cette guerre ne signifie que des sacrifices sanglants, des peines et des tourments. A présent, jugez vous-mêmes si des concepts comme "agression" et "agresseurs" n'ont pas changé de sens ces temps derniers ...
Dans ce que je vais dire à présent, je voudrais évoquer les modifications qui se sont produites dans la position internationale de l'Union soviétique elle-même. Sous ce rapport également, les changements ne sont pas de peu d'importance. Pourtant, si nous nous limitons à l'essentiel, il nous faut reconnaître que, grâce à la poursuite conséquente d'une politique extérieure pacifique, nous sommes parvenus à renforcer de façon considérable la position et le poids international de l'Union soviétique.
Comme je l'ai déjà dit, nos relations avec l'Allemagne se sont améliorées de façon fondamentale. En occurrence, le développement dans le sens d'un renforcement de nos rapports amicaux a abouti à l'offre à l'Allemagne de notre sincère collaboration et de notre aide politique pour ses efforts en vue de la paix. Le pacte de non-agression conclu entre l'Union soviétique et l'Allemagne nous oblige à garder notre neutralité au cas où l'Allemagne serait engagée dans une guerre. Nous nous sommes tenus à notre position en toute conséquence et l'entrée de nos troupes sur le territoire de l'ancienne Pologne à partir du 17 septembre n'est nullement en contradiction avec elle. Il semble suffisant de rappeler ici que l'Union soviétique a envoyé ce même jour, le 17 septembre, à tous les États avec lesquels elle entretient des relations diplomatiques un message spécial pour confirmer que U.R.S.S. poursuivrait sa politique de neutralité à leur égard.
Vous savez tous fort bien que nos troupes n'ont pénétré en territoire polonais que lorsque l'État polonais se fut effondré et avait pratiquement cessé d'exister. Eu égard à cette situation, nous ne pouvions naturellement pas rester neutres, car elle posait des problèmes urgents qui concernaient la sécurité de notre État. De plus, l'Union soviétique devait également se préoccuper de la situation d'exception qui se présentait pour nos frères d'Ukraine occidentale et de Russie Blanche occidentale, qui, du fait de l'effondrement polonais, étaient abandonnés à leur sort.
Les événements qui suivirent ont confirmé absolument que les nouvelles relations germano-soviétiques reposent sur la base solide d'intérêts communs. Après l'entrée d'éléments de l'armée rouge sur le territoire de l'ancien État polonais, d'importantes questions se posèrent concernant la délimitation des intérêts réciproques de l'U.R.S.S. et de l'Allemagne. Elles furent rapidement réglées d'un commun accord. Le pacte d'amitié germano-soviétique conclu fin septembre, qui régla également les problèmes de frontières entre les deux pays, a encore renforcé nos bonnes relations avec l'État allemand ...
Nous n'avons cessé de renforcer nos bonnes relations avec l'Allemagne et nous avons été heureux de constater un état d'esprit identique au nôtre chez les Allemands. Aujourd'hui, nos relations avec l'Allemagne sont basées sur l'amitié, sur notre intention de soutenir l'Allemagne dans ses efforts pour la paix et, en même temps, sur notre volonté de contribuer de toutes les façons au développement des relations économiques soviéto-allemandes pour le bien commun des deux États...
Permettez-moi, à présent, d'évoquer les événements qui sont en relation immédiate avec l'entrée de nos troupes sur le territoire de l'ancien État polonais. Il n'est pas nécessaire que je vous en retrace ici le déroulement. Notre presse en a rapporté tous les détails et vous, camarades députés, vous êtes très au courant des faits. Je me limiterai donc à l'essentiel. Il n'est pas besoin de preuve pour affirmer que notre gouvernement était obligé, après l'effondrement total de l'État polonais, de tendre une main secourable à nos frères d'Ukraine occidentale et de Russie Blanche occidentale. C'est ce qu'il a fait.
Lorsque l'armée rouge fit son entrée dans ces territoires, elle fut saluée par la population ukrainienne et russe-blanche avec une grande sympathie et accueillie avec empressement comme la libératrice du joug des seigneurs féodaux, des propriétaires terriens et des capitalistes polonais. Au cours de l'avance de l'armée rouge dans ces territoires, de durs combats se sont produits en divers endroits entre nos troupes et les troupes polonaises et, de ce fait, il y eut aussi des pertes. Voici les chiffres de ces pertes. Sur le front de Russie Blanche, l'armée rouge a perdu en tout 749 hommes (officiers, sous-officiers et soldats), dont 246 morts et 503 blessés. Sur le front d'Ukraine 491 officiers, sous-officiers et hommes de troupe sont tombés, 1.359 ont été blessés, soit 1.850 hors de combat. Par conséquent, les pertes totales de l'armée rouge en Russie Blanche et en Ukraine occidentale se montent à 737 morts et 1.862 blessés, soit au total 2.599 ...
Je voudrais à présent évoquer nos relations avec les États baltes. Comme vous le savez, d'importantes transformations se sont produites là aussi. Les relations entre l'Union soviétique et l'Estonie, la Lettonie et la Lituanie reposent sur les traités de paix conclus en 1920 entre ces pays et nous. A la suite de ces traités, l'Estonie, la Lettonie et la Lituanie devinrent des États indépendants et, depuis lors, l'Union soviétique a toujours poursuivi une politique amicale à l'égard de ces États nouvellement créés. C'est là que vous verrez la différence fondamentale entre la politique du gouvernement soviétique et celle de la Russie tzariste, qui opprimait brutalement les petites nations, leur enlevait toute possibilité de développement indépendant national ou politique et qui leur a laissé des souvenirs très douloureux.
Il nous faut reconnaître que les expériences des deux dernières décennies en ce qui concerne la poursuite des relations amicales entre l'Union soviétique d'une part et l'Estonie, la Lettonie et la Lituanie de l'autre ont créé un préjugé favorable à une consolidation des relations politiques et de tous autres ordres entre l'U.R.S.S. et ses voisins baltes. Cela se manifesta au cours des négociations conduites il y a peu de temps avec les représentants de ces États et dans les traités qui en résultèrent et furent signés à Moscou.
Vous savez que l'Union soviétique a conclu avec l'Estonie, la Lettonie et la Lituanie des traités d'assistance mutuelle qui, du point de vue politique, sont d'une importance exceptionnelle. Les principes qui sont à la base de ces accords sont toujours les mêmes. Ils sont basés sur l'assistance mutuelle de l'Union soviétique d'une part et de l'Estonie, la Lettonie et la Lituanie d'autre part; ils concernent également l'aide militaire au cas où l'un des États signataires serait attaqué. En considération de la position géographique de ces États qui constituent une sorte de chemin d'accès de l'U.R.S.S. spécialement vers l'espace de la mer Baltique, ces accords permettent à l'Union soviétique d'entretenir en des endroits déterminés de l'Estonie et de la Lettonie des bases maritimes et des aérodromes. Dans l'accord d'assistance avec la Lituanie, il est stipulé que la frontière de ce pays sera défendue en commun avec l'Union soviétique....
Le caractère particulier de ces accords d'assistance mutuelle ne comporte en aucune façon une immixtion de l'Union soviétique dans les affaires intérieures de l'Estonie, de la Lettonie et de la Lituanie, comme certains journaux étrangers essayent de l'affirmer. Au contraire. Tous ces traités insistent formellement sur l'intégrité de la souveraineté des États contractants et sur la non-immixtion dans les affaires des autres. Ils sont basés sur le respect réciproque de la structure politique, sociale et économique des parties et doivent tendre à renforcer les fondements d'une collaboration pacifique de bon voisinage entre nos peuples ...
Les bases de la politique soviétique vis-à-vis des petits pays ont été montrées de façon particulièrement nette à l'opinion mondiale par le traité qui prévoit le retour de la ville et du district de Wilno à la République de Lituanie. L'État lituanien avec sa population de 2.500.000 habitants accroît ainsi nettement son territoire. Sa population augmente de 550.000 habitants et il obtient la ville de Wilno dont le nombre d'habitants est presque du double de celui de l'actuelle capitale lituanienne. L'Union soviétique a préconisé le retour de Wilno à la Lituanie non pas parce que les habitants de cette ville seraient en majorité des Lituaniens. Non, les habitants de Wilno ne sont pas en majorité d'origine lituanienne. Mais l'Union soviétique a tenu compte du fait que la ville de Wilno, que la Pologne avait arrachée de force à la Lituanie, devait faire partie de la Lituanie parce que aussi bien les aspirations nationales que le passé historique du peuple lituanien sont intimement liés à cette ville. . .
Nos relations avec la Finlande sont d'un tout autre ordre, ce qui s'explique surtout par le fait que, dans ce pays, on remarque plus de signes de tentatives en vue d'une prise d'influence de la part de puissances tierces. Mais n'importe quel interlocuteur impartial est pourtant forcé de reconnaître que les mêmes problèmes concernant la sécurité de l'Union soviétique et avant tout de Leningrad qui ont joué un rôle au cours des négociations avec l'Estonie devront être évoqués aussi au cours des conversations avec la Finlande. Dans un certain sens, on peut même dire qu'en l'occurrence le problème de la sécurité de l'Union soviétique se pose de façon encore plus aiguë du fait que Leningrad - après Moscou la ville la plus importante de la Russie soviétique - ne se trouve qu'à 32 kilomètres de la frontière finnoise. Cela signifie que la distance entre Leningrad et un pays étranger est plus faible que la portée de l'artillerie lourde moderne. De plus, les accès maritimes de Leningrad dépendent en grande partie de la position amicale ou hostile vis-à-vis de l'Union soviétique de la Finlande à laquelle appartient l'ensemble de la côte septentrionale du golfe de Finlande et toutes les îles qui se trouvent le long de sa partie centrale. Eu égard à ces faits et à la situation actuelle en Europe, on peut admettre que la Finlande fera preuve de la compréhension nécessaire...
Il y a peu de temps, les négociations soviéto-finlandaises ont été entreprises sur notre initiative. De quoi s'agit-il ? Il n'est pas difficile de reconnaître que, dans l'état actuel de la structure internationale, alors qu'au coeur de l'Europe une guerre se développe entre les nations les plus puissantes - une guerre qui recèle de grandes surprises et de grands dangers pour tous les États européens -, l'Union soviétique n'a pas seulement le droit mais encore le devoir de prendre de sérieuses mesures pour le renforcement de sa sécurité. Il est donc naturel que l'Union soviétique se préoccupe particulièrement du golfe de Finlande qui forme l'accès de Leningrad par la mer et de la frontière terrestre qui, d'une distance de 30 kilomètres, a une influence dominante sur Leningrad. Je dois vous rappeler à cette occasion que le nombre des habitants de Leningrad s'est accru à 3.500.000 et égale presque l'ensemble de la population de la Finlande (3.650.000).
Il ne vaut pas la peine d'évoquer les contes de fées que la presse étrangère a publiés au sujet des propositions soviétiques à la Finlande. Certains journaux prétendent que l'Union soviétique "exigerait" la ville de Viborg et la partie septentrionale du lac Ladoga. Permettez-moi de dire ici en notre nom à tous que c'est une pure invention et un mensonge. D'autres prétendent que l'U.R.S.S. "exigerait" les îles Aland. Cela aussi est totalement inventé et mensonger. De plus nous avons eu vent de bavardages insensés au sujet de soi-disant revendications de l'U.R.S.S. vis-à-vis de la Suède et de la Norvège. Mais tous ces mensonges impardonnables ne valent pas une réfutation. En réalité, toutes nos propositions à la Finlande sont extrêmement modestes. Elles se limitent à un minimum sans lequel il est impossible de garantir la sécurité de l'U.R.S.S. et de mettre les relations avec la Finlande sur une base amicale...
Quelques mots seulement au sujet de nos négociations avec la Turquie. Au sujet de leur contenu, on fait courir à l'étranger toutes sortes de bruits. Certains prétendent que l'U .R.S.S. exigerait la cession des districts d'Ardahan et de Kars. Permettez-moi d'affirmer ici qu'il s'agit d'une pure invention et d'un mensonge. D'autres encore prétendent que l'U.R.S.S. aurait exigé des modifications de la convention internationale de Montreux en même temps qu'une position prépondérante dans les Détroits. Cela aussi est un mensonge. L'enjeu réel de cette affaire, c'est la conclusion d'un accord bilatéral d'assistance limité à la région de la mer Noire et aux Détroits. Les préoccupations de l'U.R.S.S. visaient à ce que la conclusion d'un tel pacte ne la forcerait pas à prendre des mesures la mettant en danger d'entrer en conflit armé avec l'Allemagne et, en second lieu, l'U.R.S.S. devait obtenir une garantie que la Turquie, du fait de la menace de guerre, ne permettrait pas à des bateaux de guerre de pays non riverains de parvenir par le Bosphore à la mer Noire. La Turquie a rejeté ces deux propositions rendant ainsi la conclusion d'un traité impossible.
Les négociations soviéto-turques n'ont pas abouti à la conclusion d'un traité, mais elles n'en ont pas moins permis de clarifier une série de questions politiques nous intéressant ou du moins de les examiner...
Quelques mots seulement au sujet de nos relations avec le Japon. Récemment, les relations soviéto-japonaises se sont améliorées dans une certaine mesure. On peut en donner pour signe la conclusion récente de l'accord de Moscou qui met fin au conflit de la frontière mongolo-mandchourienne. Durant plusieurs mois ou plus, précisément en mai, juin, juillet, août et jusqu'au milieu de septembre, des combats eurent lieu dans le district de Nomonhan, aux abords de la frontière mongolo-mandchourienne, entre des troupes nippo-mandchoues et soviéto-mongoles. Durant cette période, toutes sortes d'armes - y compris des avions de combat et de l'artillerie lourde - furent engagées et il y eut parfois de sanglants combats. Ce conflit absolument inutile nous coûta beaucoup de sang et les pertes des Nippo-mandchous étaient plus sévères encore. Finalement, le Japon fit des propositions en vue de la cessation de ce conflit et nous souscrivîmes avec joie aux désirs du gouvernement japonais. Comme vous le savez, cette crise éclata parce que le Japon avait tenté de approprier une partie du territoire de la République populaire de Mongolie pour modifier ainsi à son profit et par la force la frontière mongolo-mandchoue. Une telle façon d'agir unilatérale devait être rejetée de la façon la plus ferme et on a pu constater une fois de plus combien il est insensé de croire que l'on peut agir de la sorte avec l'Union soviétique ou ses alliés.
Si l'exemple de la malheureuse Pologne nous a montré il n'y a guère -combien les pactes d'assistance qui portent la signature de grandes puissances européennes sont parfois sans valeur, les événements de la frontière mongolo-mandchoue nous ont montré une chose tout autre. Ils nous ont prouvé l'efficacité des pactes d'assistance signés par l'Union soviétique. En ce qui concerne le conflit dont il est question, le point final lui fut donné par le traité conclu le 15 septembre à Moscou et la paix fut rétablie à la frontière mongolo-mandchoue. Ainsi fut fait le premier pas vers une amélioration des relations nippo-soviétiques. Le pas suivant a consisté en la création d'une commission mixte pour les frontières composée de représentants des deux parties en présence. Cette commission aura pour tâche d'examiner certaines questions litigieuses. Si nous ne sommes pas seuls à faire preuve de bonne volonté et si les intéressés, tous, en font autant, alors un examen objectif des problèmes de frontières portera ses fruits. De plus on a créé une base pour l'engagement de négociations économiques soviéto-japonaises. Il faut reconnaître que le développement du commerce entre les deux pays est dans l'intérêt de chacun d'eux.
Nous avons donc de bonnes raisons pour parler d'un début d'amélioration de nos relations avec le Japon. Mais on ne peut pas encore dire jusqu'à quel point nous pouvons compter sur de rapides progrès dans ce sens. Nous n'avons pas encore pu nous rendre compte à quel point le terrain y est préparé dans les milieux japonais. En ce qui concerne notre pays, je dois dire que nous saluons avec satisfaction ce genre de volonté de rapprochement de la part du Japon et que nous étudierons ces questions dans le sens de notre conception politique fondamentale et de nos intérêts. ***
Bien cordialement,
Francis. |
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