En toute sincérité, je ne suis pas sûr qu'on puisse assimiler l'intérêt des rapports Moulin-Frenay à celui du nombre de boutons du Landser qu'on aperçoit, sur la photographie, à proximité de l'officier d'ordonnance du Feldmarschall Rommel aux funérailles de la petite Juliette Durand à Dijon le 22 mai 1944 (private joke).
On cause en effet de ce qui sera une étape décisive de la Résistance française : comment les régiments se verront transformés en armée, pour paraphraser Malraux. En ce sens, les liens tissés entre celui qui deviendra le représentant du Général de Gaulle et le chef de l'un des plus puissants réseaux de l'ombre, Combat, ne sont pas dépourvus d'importance, y compris même me semble-t-il dans un documentaire à vocation historique. Ce d'autant que leur désunion du printemps 1943 a pu jouer un rôle dans le contexte de la tragédie de Caluire, qui décapitera l'action clandestine française.
L'importance de la chose rejaillit d'ailleurs dans les polémiques suscitées par Frenay après la guerre. En cherchant à démythifier Moulin, l'ancien patron de Combat sombrera dans le n'importe quoi (Moulin, espion communiste !) et contribuera à diviser profondément les milieux d'anciens Résistants. D'où un certain malaise qui entachera l'épopée.
Certes, le documentaire doit traiter quatre années d'Histoire en deux heures, de la défaite à la Libération, ce qui implique nécessairement une synthétisation parfois excessive. Mais le fait excuse-t-il pour autant la suggestion d'une contre-vérité, lourde d'implications politiques ? C'est effectivement ouvrir la voie à la diffusion des rumeurs les plus débiles, tant sur Moulin que sur Frenay, deux personnalités si emblématiques qu'en définitive c'est l'Histoire de la Résistance elle-même qui finit par en souffrir.
Cela étant, je suis bien d'accord : on ne peut rejeter ce documentaire en bloc - ce d'autant que j'ai apprécié leur description des mouvements communistes, effectivement nuancée, ni hagiographique, ni hypercritique. |