Jouvenel reproduit longuement dans Le Journal, le 6 avril 1939, au sein d'un article intitulé "A tout prix, l'Allemagne tentera d'empêcher la Pologne d'adhérer à une coalition", des propos qui viennent de lui être tenus par une haute personnalité allemande.
Ici sont révélés (pour la première fois ?) les débuts de la crise germano-polonaise, ou plutôt de son accélération : une visite de Moltke, ambassadeur allemand, au colonel Beck, le 14 mars (date non donnée ici, mais connue par ailleurs), pour lui réclamer Dantzig et une autoroute reliant la ville au Reich à travers le corridor.
Chamberlain est dit avoir réagi avec une clairvoyance inattendue (!!) en offrant le 31 mars sa garantie à la Pologne, un geste redoublé par l'accueil, début avril, en grande pompe, de Beck à Londres.
Hitler n'en veut pas à Beck, qui est un ami sincère de l'Allemagne mais doit tenir compte de son opinion publique. Mais attention : pas un pas de plus ! Il ne faut pas que tout cela se concrétise par une alliance. Du coup, l'Allemagne dira qu'il s'agissait d'un malentendu, qu'elle ne veut pas Dantzig... et attendra un moment plus favorable pour mettre la main dessus !
Le petit discours de la haute personnalité se termine ainsi : "A présent, les Polonais sont assurés d'alliés et fiers de leur force. Il faut leur faire connaître l'angoisse de l'isolement et de l'encerclement avant de frapper."
Et Bertrand, lui, termine alors son article, presque entièrement occupé par le discours allemand, par une courte conclusion :
"Voilà un plan admirable par son mélange de prudence et de hardiesse, un plan odieux en ceci qu'il s'agit de briser la résistance d'une nation par des tensions nerveuses qui font penser au troisième degré de la police américaine."
Lui, en tout cas, il n'est pas au second !! |