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En réponse à
-1La répression des Forces Françaises Libres ?? de Leon

Un témoin, et quel témoin ! de Laurent Laloup le mercredi 05 septembre 2007 à 19h25

Extrait des "fanfares perdues" , :


Jean Lacouture
: Vous étiez au Maroc; vous y avez alors vécu des péripéties politiques...
Georges Buis : L'émeute nationaliste de fin janvier 1944 s'est produite à Rabat en plein milieu de mon bref séjour au Maroc. Il a fallu aux chefs nationalistes un courage aveugle ou une belle inconscience pour
déclencher une émeute alors que deux divisions blindées « occupantes » campaient aux portes de la ville. Encore que ce soit la DB qui ait rétabli l'ordre au point chaud, devant le palais du sultan, sur le Méchouar, mon
unité n'a pas été engagée. Pour ceux qui y ont participé ce fut un événe­ment négligeable, tant la masse blindée avait été, d'elle-même, dissuasive.
Paul Repiton et moi avons vécu l'affaire avec beaucoup d'intensité. En nous, s'agitait l'expérience acquise à Bagdad, à Damas, au Caire. Il ne nous a fait aucun doute que nous venions d'assister à la résurgence furtive d'un problème de fond qui ressortirait, inéluctable. Arriverait un jour où l'on ne pourrait plus le nier. C'est le coup du matelas pneuma­tique. On pose le pied dessus : ça gonfle à côté. En janvier 44, à Rabat, nous étions tellement costauds que nous pouvions encore mettre les pieds
partout...

Jean Lacouture : On a raconté que des équipages avaient tiré au pistolet sur la foule par la gueule des canons. Il y a eu des morts au cours de l'émeute.
georges buis : Le coup de pistolet, techniquement, ça me paraît idiot. Il s'agissait cette fois-ci de tubes longs de plusieurs mètres. Une balle tirée dedans ne pouvait certes que ressortir au bout. Mais comment? Après combien de ricochets dans les rainures?"


Pour le plaisir, et puisque "c'est dans la boite", je vous laisse en savourer un peu plus :

"Pas question de raconter la 2eDB à Témara. On peut clore ce chapitre par un éclairage contrasté et venu de l'extérieur : deux projecteurs à 180 degrés... La visite de Giraud, pénible et comique. De Gaulle avait réussi à le pousser hors du Comité d'Alger et le vieux soldat n'était plus que commandant en chef. Quand accompagné de Leclerc il est arrivé chez nous sous les chênes-lièges de Témara, nous l'avons comblé d'autant plus d'honneurs réglementaires que nous les assortissions d'une froide animo-sité. Il y eut des petits tours de force pour éviter la poignée de main (le chef-d'œuvre en la matière fut bien entendu, loin de là, le fait de Bar-berot à la DFL. Au garde-à-vous, à l'extrémité de sa compagnie de fusiliers marins, il salua de la main gauche et la remit sur la couture du pantalon. Puis, en réplique à la main tendue, retira brusquement de derrière son dos un avant-bras droit enrobé jusqu'au bout des ongles d'un énorme plâtre).
Pour rompre la glace, Giraud crut bon de prendre familièrement la parole : « Messieurs, voulez-vous vous rapprocher... Je rentre d'une tournée d'inspection en Italie. » II y a des champs de mines qui ont parfois deux cents mètres de large! » Un éclat de rire lui répondait car nos hommes venaient du Western Désert et s'étaient battus des années durant dans des champs de mines de plusieurs kilomètres. C'était triste, ce vieux monsieur qui avait été une figure mais sans doute longtemps surfait : « Giraud fut un chef de bataillon qui eut beaucoup de rayonnement » écrivait férocement Catroux à de Gaulle, en 1942, dans un télégramme que j'ai chiffré. Pour ce que j'en sais sa vie avait été celle d'un soldat courageux et honnête mais ses choix politiques et l'enfantillage de son voyage aux États-Unis, sa hargne de vieillard faible, ses moustaches, ses leggins, son uniforme 1939, son cheval blanc pour entrée triomphale dans Metz, en faisaient, aux yeux d'une jeunesse violente et avide d'effi­cacité un personnage de musée Grévin.
Nous avons eu aussi la visite de De Gaulle. Il a réuni les officiers au casino de Témara. Devant la troupe (« Cette armée à laquelle j'ai appar­tenu... » m'a-t-il dit, un jour de 1959, en Algérie), il était plus à son aise, plus libre et donc plus fort qu'en toute autre circonstance. La formule par laquelle il nous a laissé entendre que nous serions du débarquement exécuté à partir de l'Angleterre fut cependant d'une parfaite ambiguïté. Un souvenir précis : « Vous êtes des gens heureux. Vous ne connaîtrez les Allemands que morts ou prisonniers. »

Jean Lacouture : Leclerc est déjà, pour vous, le patron?

Georges Buis : Pour nous, oui. Il n'a pas encore la dimension qui sera la sienne plus tard mais il est non seulement le premier dans l'état mili­taire, il est aussi une sorte de supermilitaire. Pas endormi sur ses lauriers du Cameroun, de Koufra, de Cyrénaïque et de Tunisie. Bien au contraire, il manifestait la virulence de l'acide à l'état naissant. Professionnel de premier ordre par la connaissance, le dévouement à la tâche, la passion du travail sur le tas. Il n'était pas l'homme des ronds de jambe à Rabat ou à Alger. Il disposait d'une villa et vivait dans sa caravane, à portée de ses téléphonistes et de ses radios. Techniquement, psychologiquement, moralement il était confronté à des problèmes redoutables et, pour les assumer pleinement, les vivait sans répit. La première fois que Repiton et moi avons dîné à sa popote, nous avons essayé de parler d'autre chose que du Nième régiment d'artillerie. A chaque tentative nous avons été rabroués. Les rivalités des alliés en Méditerranée? Le monde arabe dans lequel nous vivions et ses problèmes politiques? Refusés, zéro. En sortant j'ai dit à Repiton : « Mais c'est un con! » Avec son grand rire : « C'est ce qu'il nous faut. S'il ne l'était pas, il ne se serait jamais lancé dans la traversée du Sahara avec des guimbardes à rester en panne sur la Concorde. »


Cordialement
Laurent

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