En écrivant un truc sur les Bienveillantes de Littell, j'ai repensé à Sarah Vajda pour qui l'Histoire est fille des Lettres. J'ai retrouvé un message où il est question des "langues" (au sens de langages) de Vichy :
De Vichy, ses contours et ses ombres, nul historien ne dessinera autre chose qu'un cadre vide, une structure en attente de contenu.(...) Aucune catégorie de jeu, fût-il double ou triple, ne saurait rendre compte de ce qui est advenu entre Paris, Londres, Alger, les maquis et les camps de prisonniers à l'Est comme à l'Ouest entre 1940 et 1945. Pour saisir la nature du bouleversement, il faudrait qu'un témoin de l'intelligence de Victor Klemperer se soit arrêté, jours après jour, sur les changes des mots, reprendre l'admirable livre de Jean-Pierre Faye, "Les Langages totalitaires", et étudier les langues du colonel de la Rocque, celle des Cagoulards et de leurs multiples factions, du PCF, des socialistes, des catholiques et existentialistes, des maréchalistes de cœur ou d'intrigue, des vichysso-résistantialistes, partisans de la victoire avec l'Allemagne ou patriotes qui rêvaient de rénovation : alors peut-être parviendrions nous à savoir quelle mémoire condamner ou quelle mémoire chérir, n'en effaçant aucune.
Sarah Vajda a signé Jean-Edern Hallier : l'impossible biographie, chez Flammarion, 2003.
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