Dans son épatant Journal de lectures, Pol Vandromme saluait il y a quinze ans le beau roman Eté 36 de l'académicien qui vient de nous quitter (extraits) :
La sottise de la droite politicienne, qui ne saura comment prendre l'Eté 36 de Bertrand Poirot-Delpech, ne manquera pas de décréter : c'est un livre de gauche. On sait qu'elle a la gauche en horreur et les livres plus encore.
La droite des hussards n'aurait pas joué dans cette partie truquée par la mauvaise foi et l'inculture. De l'Eté 36, elle aurait dit : c'est un livre acéré, turbulent. cocasse, vrai, juste. Nimier aurait eu devant Poirot-Delpech la réaction de Drieu, plus fou à l'époque de littérature que de politique, devant Aragon : ah ! le petit camarade.
L'amour de la littérature crée et consolide cette camaraderie initiatique. Qu'importe si nous voyons le Front Populaire avec d'autres yeux que Bertrand Poirot-Delpech. Ou plutôt : si nous écoutons le chant de l'histoire avec un enthousiasme moins fiévreux que le sien. (...)
Au lieu de chialer comme à son habitude, la gauche ricane et dédaigne. Nous avions besoin de ce rire - un peu pincé parfois - qui fouette les sangs. Poirot-Delpech a tout lu, mais Anouilh, Aymé, Céline plus que d'autres. Cela se voit. Cela se sent. Nous ne célébrons pas un pastiche; nous saluons un écrivain capable de reconstituer une chronique rétro (en en transcendant l'anecdote) et d'inventer des personnages aussi modernes, aussi fabuleux que Victoire (...) et qu'Alexis.(...) (Note : les personnages centraux du roman.)
Au premier rang, à sa place véritable, dans la fraternité de Nimier, se permettant tout parce que rien ne lui résiste, voici Bertrand Poirot-Delpech.
Pol Vadromme, Journal de lectures, Lettera-L'Age d'Homme, 1991.
Bien cordialement.
RC |