Bonsoir,

Si certains passages de ces mémoires de guerre sont influencés par des lieux communs et des à priori qui peuvent nous renseigner sur l'époque à laquelle ils furent rédigés (juste après les accords d'Evian qui ont navré le colonel) ou sur la perception de certains personnages de Vichy par leur auteur : pour un homme qui eut une compagne juive, Groussard, gêné aux entournures, excuse en partie un individu tel que Xavier Vallat, expliquant que lui-même et ses proches bénéficièrent d'exceptions signées par le commissaire aux questions juives...C'est possible mais cela ne saurait disculper l'antisémitisme militant de Vallat ! En revanche, lorqu'il exprima le souhait de rejoindre une unité combattante avant d'être sollicité par les services secrets anglais, ce sont les éléments free french qui eurent ses faveurs. Si le colonel est clément envers certains cadres de l'Etat français (de vieilles amitiés et des services rendus, on s'en doute, bien qu'il ne le précise pas vraiment ?),en revanche, les cadres attentistes de l'armée d'Afrique ne trouvent à ses yeux aucune circonstance atténuante. Selon cet officier de carrière, ancien commandant de Saint-Cyr, les officiers de l'armée d'Afrique étaient pour la plupart incompétents, résignés ou pire, prêts à défendre la politique d'abandon d'un Darlan. Selon lui, ils avaient une guerre de retard et n'ont pas compris les enjeux et les méthodes de la guerre moderne qui bouleversait le monde.
Pourtant Groussard n'était ni un gaulliste fervent ni un progressiste masqué; simplement, son poste d'observateur privilégié lui permit de bien saisir les carences de ceux qui ont attendu les Alliés - quand ils ne leur ont pas fait tirer dessus - pour rentrer dans la guerre. (Groussard,il faut le souligner, avait constitué ses premiers réseaux de renseignement en France dès la fin 1940.)

Cordialement,

René Claude