Extraits de "Notes de guerre" du général de Monsabert
19 juin 1940
***Anxiété. Angoisses. il faut résister en Afrique du Nord avec toute la Marine et toute l'Aviation. Ici, on peut attendre des renforts de toutes sortes. Il faut permettre à l'Angleterre de continuer la lutte, et attendre les moments voulus par Dieu, qui ne peut pas ne pas nous sauver. Pourvu qu'on ne signe pas ! C'est notre seule angoisse.(...) Visite de Guillaume. On parle de la possibilité de faire la guerre en Afrique du Nord, on espère, au milieu du pire désespoir.
Signera-t-on? acceptera-t-on d'abandonner la lutte à l'Angleterre quand l'Afrique du Nord nous ouvre des possibilités si grandes?***
22/30 juin
*** La seule question qu'on se pose encore c'est de savoir pourquoi, avant le 13 juin, on n'a pas décidé de continuer la lutte en Afrique du Nord, en y envoyant un minimum de forces et de munitions L'aviation et la marine auraient rejiont au complet. Et quelle impression formidable en Afrique, auprès de nos Indigènes ! L'Afrique du nord serait devenue la France même, une part de la France même!***
Interruption des "notes " entre le 30 juin 40 et le 2 novembre 43
***De l'entre-deux-guerres, je ne dirai qu'un mot: c'est que je n'ai jamais accepté la défaite. (...) j'ai toujours annoncé la guerre et non la paix. Cette armée d'Afrique a l'orgueil d'une armée qui n'a jamais été vaincue.(...) Et puis Weygand est parti, renvoyé sur ordre de l'Allemagne. Laval est revenu, les humiliations de la Patrie transpiraient à travers toutes les feuilles officielles.(...)
C'est alors que Giraud s'est évadé. Giraud ne s'était naturellement pas évadé pour rester au coin de son feu. Peu a peu, j'ai appris le travail de préparation qui se faisait dans l'ombre sous sa direction. Enfin Mast arriva de France et me fit connaîtres les grandes lignes de ce plan.***
La suite, on la connait. Contre l'avis de nombreux Etats Majors , Monsabert et quelques autres hommes feront "tout" pour "accueillir" les Américains et Giraud (je résume !). Peu après:
***Nous faisons toujours figure de proscrits, susceptibles d'être arrétés d'un moment à l'autre par les autorités régulières d'Alger" ***
Opposition de tous les Etats Majors, qui se manifestent ouvertement. Giraud est déçu. L'Armée d'Afrique ne s'est pas levée à son nom
S'en suivra pour Monsabert: une mise à l'écart, un soutien (jugé trop mou) de la part de Giraud, l'opposition quasi inflexible de Koeltz, des rumeurs d'assassinat à son encontre, et plus tard, au cours du printemps 43, des affectations de plus en plus secondaires. Il est prèt à s'engager dans la Légion, tant il se sent mis à l'écart. Ce qu'il veut, c'est un commandement.
***L'hostilité de l'Armée dite régulière me fermait toutes mes anciennes voies***.
On va même jusqu'a lui donner le commandement d'un Bataillon.
***J'accepte sans manifester d'amertume des commandements inférieurs à mon grade...(...) je n'ai qu'une ambition, me battre et je n'y arrive pas ! Je me sens terriblement seul, abandonné. Je suis en quarantaine.(...) Qu'importa la nature du commandement, pourvu que j'aie un secteur où me battre et servir!***
12 avril 43
Il reçoit le commandement le la 3e DIA. Qui lui est retirée le lendemain! ***Ultime manoeuvre de couloir*** et redonnée le 14 avril.
*** Pauvre, pauvre France! Ah, heureusement qu'il y a la Foi. Et cette Foi, je l'ai!***
En septembre 43, il est menacé par une rumeur de l'abaissement de la limite d'âge.
***Je lui parle de la lutte sourde que je sens menée contre moi dans les couloirs des Etats majors, par les jeunes turcs d'aujourd'hui. (...) Ce qui froisse le plus dans cette triste constatation c'est le faux air de bons apôtres qu'ils se donnent. Vite! Vite! à l'action là où "ils" ne vont pas.***
Fin septembre 43, il est l'objet d'une enquête par le Controleur général de l'Armée.
Le 14 dec. 43, il quitte l'Afrique à Bizerte pour Naples...
Je lui laisse la conclusion:
***Je plains l'historien qui voudra rester impartial pour conter cette histoire !*** dit-il page 123 (10 avril 43)
Et sa devise favorite, répétée comme un litanie dans ses Notes:
***"Les hommes s'agitent , Dieu les mène!"***
ET pour répondre -finalement- à F. Delpla, je ne connais absolument rien des sentiments du retraité Monsabert au temps de la guerre d'Algérie.
Frédérique |