Il y a les lois, et la façon dont elles sont appliquées par les exécutants, sur le terrain.
L'armée allemande ne s'est jamais embarrassée de protocole humaniste, tant dans les combats que dans le traitement de prisonniers. Tous ceux qui ont une bibliothèque de moyenne importance sur la SGM auront eu un aperçu des procédés d'une armée et d'un régime qui a commencé la guerre en mettant des uniformes polonais, et qui l'a terminée en mettant des uniformes américains. Hors des élégances des grandes percées victorieuses, la guerre allemande n'a été faite que de coups tordus, dont il serait oiseux de faire ici l'énumération même succinte. Le traitement des prisonniers Noirs et arabes, ou soviétiques, le démontre amplement, ainsi que le destin de l'infirmerie du Vercors.
Qu'on puisse, 60 ans aprés, à froid, ne vouloir s'en tenir qu'aux textes réglementaires, et aux rapports de chefs d'état-major ne donnera qu'une vue tronquée et inexacte.
Il y a la guerre des historiens, qui s'interrogent sur le sens d'un mot, d'une phrase, d'une virgule, sur un message personnel de Darlan, de Badoglio ou de Horthy.
Et la guerre par ceux qui l'ont faite, et c'est tout autre chose.
En sens inverse, dans le camp allié, la barbarie a suscité un effet boomerang, et la même barbarie, nous sommes bien d'accord. Dés juin 1940, les Sénégalais de l'armée française coupaient les oreilles des Italiens, sur le front de Menton. Et la pratique s'est étendue à toutes les armées dans tous les camps.
Certains régiments de paras américains avaient repris la coupe de cheveu et le maquillage de guerre des Indiens, mais aussi la pratique du scalp, qui est pudiquement omise par les chroniqueurs.
Les Allemands n'ont jamais hésité à tirer sur les véhicules sanitaires, ou les blessés anglo-américains, en toute connaissance de cause. Ce qui ne les empêchait pas, comme à Falaise, d'utiliser des convois d'ambulances pour apporter troupes fraiches et munitions au front. Un ancien du GC "Ile de France" me l'a relaté. Ca ne figure évidemment sur aucun acte officiel, encore moins juridique. Mais les pilotes de la RAF, à partir de ce moment, ont tiré sur toutes les croix rouges du front de Normandie. Avec des impacts souvent trés explosifs!
Quant aux viols, ils entrent dans la vieille tradition guerrière qui fait des femmes le repos du guerrier. On ne parle que des viols de l'armée rouge, par vieux parti pris anti-communiste. Mais c'est omettre le système impeccable de l'armée allemande d'organiser et codifier le viol de masse. Les femmes polonaises ou russes, raflées, tatouées, et affectées à des bordels de campagne, avec une ampleur dans les effectifs suffisante pour satisfaire les besoins de toute l'armée allemande. Pour les officiers et les élites, il y avait des bordels plus sélects, avec les plus belles oiselles du troupeau. Ray Petitfrère (puisque vous aimez les textes) atteste de bordels d'enfants en Lituanie, au bénéfice des pédophiles en uniforme.
Mais il y a trés peu d'informations sur les viols commis par les soldats allemands "korrects" et vainqueurs, à l'Ouest, en juin 1940. La propagandastaffel a fait du bon boulot. Pour les Français de 2005, comme ceux de 40, l'entrée des Allemands, c'était le défilé d'athlètes blonds et bronzés, tête nue, qui chantaient si bien, au pas cadencé.
Idem même pour les libérateurs de 1944, qui étaient pourtant reçus à bras ouverts, et ne devaient guère se voir opposer de refus. Un témoignage de prêtre, à Bayeux, relate les chaudes bagarres nocturnes entre Anglais et Américains, pour s'accaparer les faveurs des Normandes. Les archives américaines concèdent un total de 17000 viols commis en France par les G.Is, en 1944. Chiffre officiel, pour les affaires connues et jugées.
Pour les viols commis en Allemagne, du côté "alliés de l'Ouest", aucune statistique n'existe.
On ne fait pas la guerre avec des enfants de choeur. Et si on la réduit à une sorte de kriegspel rétroactif, avec des "si" et des "il eut fallu" on crée un univers virtuel et surréaliste, et on perd de vue la réalité.
Il ne faut pas se voiler la face, la guerre, c'est cela aussi.
Bien amicalement. |