Difficile de savoir ce que contrôlait réellement le chef de l'armée suisse et quel fut son niveau de connaissance en ce qui concerne la ligne de complicité "amicale" (Masson dixit) entre Schellenberg et son chef du SR. Comme vous l'insinuez justement, Guisan a très bien pu jouer le naïf en espérant que ce deal (à perte) de baraques serait oublié à la fin du conflit... Et si l'affaire nauséeuse des baraques vendues à la SS dans laquelle fut impliqué son fils avait poussé le général à renforcer le secret sur ces relations au plus haut niveau en ne voulant pas s'en mêler... tout en exigeant d'être tenu informé ? Masson se grillait en cas de fuite et le général restait clean, c'est en gros ce qui se passa après la fin du IIIe Reich quand l'affaire sortit dans la presse; même si Guisan fut suspecté, il ne fut pas accusé au point d'être déboulonné du piédestal de héros national. (Au nom du consensus et bientôt de l'anticommunisme, les pouvoirs firent front.)
Dans le Journal que tint le subtil Bernard Barbey (chef de l'état-major particulier de Guisan) point une lassitude et surtout une forme d'exaspération : alors qu'il était justement en charge des affaires personnelles de son chef, il eut le sentiment d'avoir été maintenu éloigné de ces contacts dangereux dont il était pourtant informé et en conserva une rancœur.
Francophile lettré pro-Alliés, un Barbey réellement mis au parfum n'aurait peut-être pas laissé son patron s'embourber - même indirectement - dans de telles combinaisons avec les représentants d'une organisation criminelle, fut-ce au nom de la sécurité du pays. C'est sans doute pour ça qu'il fut tenu à l'écart de ces relations.
Je crois que Masson a ressenti assez vite de la sympathie pour le séduisant et redoutable chef SS et qu'il a tenté a posterio de justifier cette relation au nom de "secret défense".
RC |