Comparer les génocides, il faut faire abstraction, tout d'abord de l'élément subjectif, et de toute empathie ou compassion, voir les choses avec le regard froid de l'historien, qui se pencherait sur les faits, mille ans plus tard.
La différence saute aux yeux quand même: dans le cas des massacres contre les Arméniens et les Tutsis, on trouve la brutalité barbare, l'improvisation, et aucun souci de divulgation ultérieure. Numériquement, le nombre des victimes reste bien inférieur à celui qu'aurait produit l'éradication TOTALE des populations visées.
Volonté de destruction, effectuée par des peuples primitifs avec des méthodes artisanales.
Dans le cas du génocide nazi, l'expression est là encore partiellement inexacte, parce que les nazis ne pouvaient en aucun cas rayer la totalité des juifs existant au monde.
Mais on trouve des méthodes toute autres, de récolte du renseignement, de mise en fiches, d'acheminement des condamnés par des camps-étapes ou des ghettos.
Le regroupement (éthymologiquement: camp de concentration) avant la destination finale. C'est une copie de l'acheminement du cheptel de boucherie.
Les méthodes modernes d'un grand pays industrialisé ont été mises en oeuvre, dans la scrupuleuse récupération de tout ce qui pouvait être réutilisé, jusque dans la mise à mort, et l'élimination des corps.
Il y avait aussi une évidente volonté de dissimulation de l'ampleur du massacre.
Si le Reich avait gagné la guerre, ou conclu une paix séparée, presque rien n'aurait transpiré.
De distingués technocrates auraient délibérément minimisé le nombre des juifs vivant en Europe avant 1939, et le Reich victorieux aurait dicté SA vérité: de malencontreux décés dus à des privations ou des maladies, dont quelques dizaines de milliers de juifs auraient été victimes.
Des victimes de la guerre, en somme. |