Bonjour,
Votre question sur la réputation de légalité du gouvernement Pétain renvoie au “nœud“ que constitue encore l'Etat français de Vichy dans la mémoire nationale. Pour tenter d'y répondre, une analyse intégrant des paramètres juridiques, politiques, sociologiques, culturels, voire irrationnels - ayant trait à l'inconscient - me paraît nécessaire.
Sur Livres de Guerre, nous essayons d'éclairer cette question depuis le début par une approche plurielle et grâce à des grilles de lecture variées non exclusives.
Il y a des éléments de réponse chez Henri Rousso, chez Anne Laurens, chez Didier Fischer ("Le Mythe Pétain"), chez F. Kersaudy, chez certains biographes de de Gaulle (Lacouture, Roussel, Barré), chez J.-P. Cointet, etc. Anne Laurens a, je trouve, bien résumé le statut inachevé de l'Etat de Pétain qu'elle dit voulu par ses rédacteurs désireux de ne pas figer le régime.
Si ce flou juridique semble convenir à certains défenseurs de Pétain et de l'Etat français, c'est justement parce que ça leur permet d'affirmer que l'Etat dit de Vichy était l'émanation légale et légitime de la dernière assemblée nationale de la IIIe République.
Que l'Etat de Vichy ait eu une profonde assise populaire jusqu'en 1942-43 qui permit au vieux maréchal et à ses ministres de fonder sa légitimité, personne ne le conteste. Des millions de Français, assommés et bouleversés par la terrible défaite de mai-juin 40, avaient besoin d'une figure paternelle sécurisante qui leur répétait les formules simplistes et choc qu'ils avaient envie d'entendre. Ce qu'il y a d'étonnant, plus de 60 ans après les faits et alors que l'on connait aujourd'hui le réalité politique et policière du régime et sa vassalisation au IIIe Reich, c'est la persistance de la thèse légaliste, et pas uniquement chez des groupuscules ou associations de nostalgiques pétainistes...
Cette thèse leur permet d'entretenir l'illusion du bouclier Pétain plébiscité par les représentants du peuple français après la défaite et l'effondrement civil et militaire du pays.
Je suis persuadé que cette question mérite encore d'être creusée par une approche multiple s'appuyant sur des recherches et des analyses complémentaires.
Bien cordialement,
René Claude |