"Les grands crimes, loin de se soupçonner, ne s'imaginent même pas".
M. Richet, ex-avocat au Parlement, les Causes célèbres Amsterdam 1772.
Cette phrase, en exergue du livre de Pierre Durand, en rappelle une autre, celle de Raymond Aron:
"Le génocide, qu'en savions-nous à Londres? ... les chambres à gaz, l'assassinat industriel d'êtres humains, non, je l'avoue, je ne les ai pas imaginés et, parce que je ne pouvais les imaginer, je ne les ai pas sus".
("Mémoires", Julliard, page 176).
Je n'ai pas de réponse à ta question. Ces malades mentaux, vieillards, impotents, handicapés... sont morts dans l'indifférence générale. Ils étaient les parasites de la société, parqués dans des asiles-mouroirs, privés des soins élémentaires, privés de nourriture, privés de tout. C'était dans "l'air du temps". Alexis Carrel, rappelé des Etats-Unis par le régime de Vichy, envisageait des réformes profondes et hardies qui plaisaient au maréchal Pétain et qui se résument par ces trois mots galvaudés : Travail, Famille, Patrie. En clair: l'interdiction du travail des femmes, la transformation des classes sociales en classes biologiques, l'élimination des "tarés"... pour une société nouvelle.
Bien sûr, ces indésirables de la société n'ont pas été éliminés de manière industrielle comme en Allemagne nazie. Non! On les a laissé mourir de mort lente en les privant délibérément des besoins élémentaires pour survivre... malgré, il faut le préciser, les appels pressants aux autorités, de médecins, d'infirmiers, de prêtres qui n'acceptaient pas l'intolérable.
Peut-être un début de réponse à ta question: Pourquoi sont-ils morts dans l'indifférence générale? Peut-être parce qu'ils étaient "différents". Depuis lors rien n'a changé ou si peu.
Bien cordialement,
Francis. |