Bonsoir,
En relisant des passages de la biographie de Canaris signée Heinz Höhne, j'ai relevé ceci à propos des groupes d'officiers supérieurs antinazis en contact quasi permanent avec le chef de l'Abwehr.
Ces généraux exprimaient le désir semble-t-il sincère d'entreprendre "quelque chose" pour empêcher la catastrophe finale qu'ils pressentaient pour l'Allemagne. Ils se disaient prêts à stopper Hitler, en l'abattant s'il le fallait avec Gœring, Himmler, Heydrich et Ribbentrop, mais furent retenus moralement jusqu'à la tentative de von Stauffenberg en 1944 :
Mais le fait que l'Allemagne était en guerre constituait la principale difficulté. Tout dirigeant de ce coup d'Etat se devait de reconnaître que les puissances occidentales pourraient bien profiter des désordres internes, voire même d'une guerre civile, pour déclencher une offensive de grande envergure contre le Reich. Pour certains ce fut une excuse pour ne rien tenter, mais en tout état de cause cette question figura au centre des discussions.
Oster (note perso : un des membres de la conjuration qui avait conçu un plan en 1938 repris en 1939.) en conclut qu'il fallait approcher les dirigeants occidentaux et obtenir d'eux une sorte d'accord tacite ainsi que, si possible, une garantie de l'intégrité du nouveau territoire du Reich.
(p. 366)
Ces conjurés antinazis avaient une vision pour le moins faussée de l'état d'esprit des chefs politiques et militaires occidentaux en poste en 1939 qu'ils supposaient bellicistes. Quand on sait qu'ils ne firent rien - si on excepte la ridicule promenade de quelques kilomètres à l'intérieur du Reich pendant que la Wehrmacht écrasait la Pologne, on doute de l'efficacité de l'Abwehr dans son travail de renseignement à l'Ouest...
Mais c'est surtout la notion du serment au Führer brisé qui fut au centre des multiples hésitations et retournements d'officiers supérieurs allemands. Ils semblèrent paralysés à l'idée d'être plus tard accusés de trahison envers un homme et un régime qu'ils affirmaient pourtant sincèrement vouloir supprimer.
On doit aussi constater que bien peu d'entre eux avaient la "tête politique"; il émane de certains compte-rendus des réunions clandestines une sorte de naïveté affligée, à défaut d'un autre terme pour définir leur attitude collective.
Bien cordialement,
RC |