Bonjour,
Déniché dans cette même documentation de fonds de cave (humide), le compte-rendu des activités d'une société de travaux publics désignée sous le pseudonyme de Zug et Pice.
Cette petite entreprise familiale s'est développée de manière "exemplaire" pendant l'occupation. Elle prospère dans les travaux publics et plus particulièrement la construction des fortifications du Mur de l'Atlantique. L'organisation Todt confie également à cette entreprise des travaux dans toute la France. Il s'agit, dans la plupart des cas, de la construction de cales de lancement de bateaux, de rampes pour V1, de dallages pour la Kriegsmarine. A Paris, l'aménagement d'abris bétonnés sous le Sénat est conduit de manière tellement satisfaisante que les autorités allemandes invitent les ouvriers français à un vin d'honneur. Ce n'est pas tout: Zug et Pice exécutent des travaux sur le sol du Reich, notamment à l'usine de produits chimiques de Rhumsfring, à la centrale thermique de Lensberg, à la raffinerie de Marienau ... Cerise sur le gâteau, s'associant à l'effort de guerre nazi, l'entreprise fait bénéficier l'Allemagne de l'un de ses brevets - le mur hydrostatique - intéressant au plus haut point les installations portuaires de la Kriegsmarine.
A la Libération, des sanctions purement professionnelles frappent les dirigeants de la société. Sur le plan financier, celle-ci est condamnée à verser seulement 1% du chiffre d'affaires réalisé avec les Allemands. Quant aux poursuites pénales, il n'y en a point.
L'avocat général, chargé de requérir contre les responsables de la société est tellement indigné par la légèreté des sanctions qu'il demande à être relevé de ses fonctions, faisant valoir qu'il ne saurait désormais traduire en justice tant d'autres accusés moins coupables.
Le motif du point d'interrogation amorçant cette contribution: l'auteur du compte-rendu prend soin de ne jamais nommer cette société que sous le pseudo "Zug et Pice" en ajoutant que cette société continue encore aujourd'hui d'avoir pignon sur rue. Aujourd'hui? Disons dans les années 70, date du compte-rendu. Les "rois du béton" seraient-ils intouchables?
Bien cordialement,
Francis. |