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Moi j'aime bien comparer ! de Jacques Ghémard le mardi 22 octobre 2002 à 21h38

*** Mais attention ! Il ne faut pas glisser vers un amalgame que tenta de faire Jacques Vergès lors du procès Barbie en comparant les crimes nazis aux crimes commis durant la décolonisation. ***

Moi j'aime bien comparer et je ne suis pas sûr que Verges ait complètement tort. J'essaye de m'expliquer :

D'abord, bien évidement la comparaison ne doit pas chercher à minimiser. Verges cherchant à utiliser cette comparaison pour défendre ses clients, on peut penser que minimiser était son objectif mais je suis persuadé qu'en fait il se moquait complètement du sort de Barbie et ne cherchait qu'à nous faire prendre conscience de faits que, comme Papon, nous sommes incapables d'admettre.

Les comparaisons entre les crimes nazis et ceux de notre système (ou d'autres, ceux du stalinisme par exemple) ne sont réductrice que si celui qui les entend ne reconnais pas la réalité des crimes qui le dérange. J'explicite : si je n'admet pas que Staline est un criminel et que je le compare à Hitler, alors Hitler n'est pas un criminel. Si j'admets que Staline est un criminel alors, le comparer à Hitler laisse, à ce dernier, son statut de criminel.

Le paradigme actuel c'est "le summum du crime a été atteint par le nazisme", et on peut ajouter ce sous entendu, "il ne sera jamais dépassé", ce qui est bien commode et absout le reste de l'humanité pour le passé et pour le futur. J'attends vainement que ce théorème me soit démontré. Je crains qu'il ne repose plus sur des conviction religieuses que sur des arguments logiques,

Six millions de morts assassinés par des méthodes à la fois industrielles et barbares, avec le consentement tacite de toute une population et l'assistance de quelques autres, c'est indéniable, inégalé, mais pas inégalable ni incomparable.

Quelques bombes atomiques bien placées et en une demi heure on est capable de faire encore mieux à tout instant.

Le commerce triangulaire était lui aussi basé sur des préjugés raciaux, utilisaient le summum de la technique maritime de l'époque et avait l'aval de nombreuses communautés. Il peut présenter un bilan inhumain très approchant.

*** Mais je le répète, je ne souhaite pas entrer dans les comparaisons réductrices.***

Moi non plus, au contraire, mais j'aimerai bien que les crimes nazis nous permettent de ne pas en faire autant plutôt que de nous servir d'excuse éternelle du genre "on peut pas faire pire... alors pourquoi se gêner".

Quelques généraux Indiens et Pakistanais auraient déclaré que la guerre nucléaire entre leurs pays était envisageable. Ils pourraient se permettre quelques millions de morts sur le milliard que représente leur populations. Quelle différence avec Hitler si ce n'est qu'admettre la similitude nous obligerait à faire quelque chose, ce qui nous embarrasse fort (et moi le premier).

J'ai appris avec Jules Roy que la France avait demandé aux Américains quelques bombes atomiques pour se dégager de Dien Bien Phu. Si c'est vrai et on l'avait fait, quelle différence avec l'effet du nazisme ?

Donc, si quelqu'un pouvait me démontre que j'ai tord, ça m'arrangerai bien. Mais si je ressens effectivement bien des comparaisons comme une tentative de réhabilitation du nazisme, je ressens aussi les arguments contraire très souvent comme l'expression de mauvaises conscience par rapport au stalinisme pour lequel on ne veut pas admettre notre passivité coupable (mais je ne sais vraiment pas ce qu'on aurait pu faire et en tout cas la solution n'était pas l'engagement dans la LVF)

Bref, je suis d'accord, il faut faire attention dans les comparaisons qui peuvent être fausses ou trompeuses, mais il ne faut pas se les interdire, au contraire.

Amicalement
Jacques.

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