le Glossaire de Francis a trouvé : - | Dans le cadre de l'organisation de la Résistance, la lettre R suivie de 1 à 6 indiquait une région de la zone Sud (zone non occupée jusqu'en 1942).
R1 : Région Rhône-Alpes (centre Lyon).
R2 : Région Provence-Côte d'Azur (centre Marseille).
R3 : Région Languedoc-Roussillon (centre Montpellier).
R4 : Région du Sud-Ouest (centre Toulouse).
R5 : Région de Limoges (centre Brives puis Limoges).
R6 : Région de l'Auvergne (centre Clermont-Ferrand).
En zone Nord occupée, les régions étaient définies par les simples lettres : P - A - B - C - D - M
(voir "zone")
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PM - Police municipale - France |
Dans ce texte : Le miracle belge de Francis Deleu le lundi 24 janvier 2005 à 22h43Bonsoir Serge, bonsoir à tous,
A quoi tient ce que l'on a appelé le "miracle belge" c'est-à-dire l'extraordinaire redressement de la Belgique, pourtant exsangue, dès les années 45? Plutôt que de vous encombrer l'esprit avec mes fumeuses théories économiques, je me propose de vous narrer les quelques points saillants, marqués du bon sens propre aux Belges, qui leur ont permis de redresser si rapidement la tête.... au grand dam de leurs voisins.
- L'opération Gutt.
Prosper nous a raconté que le gouvernement belge en exil à Londres rentre à Bruxelles le 8 septembre 1944. Un homme est absent et pas n'importe lequel ! Cet homme est Camille Gutt, brillant économiste et ministre des Finances. Gutt n'a pas chômé lorsqu'il résidait à Londres. Dès 1943, il songe aux problèmes de l'après-guerre. Il est convaincu que l'excès de la masse monétaire qui s'est gonflée du fait de l'occupant mais aussi à cause du marché noir provoquera une inflation monstre. Aussi prépare-t-il, dans le plus grand secret, quelques mesures qui feront grand bruit et qui, par leur impopularité, mettront un terme à la carrière politique de ce grand homme dont le monde entier reconnaîtra les mérites... bien plus tard. Discrètement, Gutt fait imprimer sur les presses de la Banque d'Angleterre à Londres pas moins de 120 tonnes de billets de banque. Et lorsque le moment est venu de les rapatrier en Belgique, Camille Gutt tient à accompagner le pactole. Sait-on jamais avec ces satanés Français! Les billets traversent la Manche à bord d'une barge de débarquement. Sur les plages de Normandie les billets sont chargés sur des camions de l'armée américaine et prennent la route de Caen, puis Rouen. De Rouen, le transport se fera par le rail jusqu'à Liège et enfin de Liège à Bruxelles.
Gutt ne prend pas le risque d'un échec. Il s'assure le concours d'un homme de poigne doublé d'un financier: l'ambassadeur de Belgique aux Etats-Unis, Georges Theunis. Ce dernier est nommé à la tête de la Banque Nationale qui aura la lourde charge technique de l'opération.
Mais en quoi donc consistait cette opération préparée par Camille Gutt ? Du jour au lendemain (ou presque), tous les billets de banque en circulation n'eurent plus cours légal c'est-à-dire perdaient toute valeur. Horreur et stupéfaction dans les chaumières belges et plus particulièrement dans les demeures des "nouveaux riches" du marché noir. Tout n'était pas perdu pour autant, rassurez-vous! Les anciens billets furent échangés contre de nouveaux mais... en quantité limitée et d'un montant égal pour tous. Le surplus fut converti en rente à long terme. Parallèlement, les dépôts en banque furent gelés et convertis grosso-modo de la même manière. D'un seul coup, la masse monétaire était réduite à un niveau acceptable, les risques d'inflation s'évanouissaient et l'économie belge pouvait redémarrer sur bases saines. Quant aux "richesses" mal acquises au marché noir, elles ne prirent pas le risque de s'exposer au grand jour.
Une petite parenthèse qui n'est pas sans importance pour nos amis français. Un autre grand homme, Pierre Mendès-France, fut tenu dans le secret des dieux de la finance. Il batailla durement pour réaliser une opération similaire "socialement équitable (chacun recevait au départ la même somme), moralement juste (l'enrichissement douteux est démasqué) et surtout économiquement saine, car par cette épargne forcée, on proportionne la circulation monétaire à la production (les fonds sont débloqués au fur et à mesure des progrès de la reprise et on casse le processus inflationniste". On sait ce qu'il en advint. Seuls quelques socialistes, proches de Mendès-France le soutiennent, la droite et surtout le Parti communiste (allez-savoir pourquoi?) est contre. Désavoué, P.Mendès-France démissionnera.
- Le Prêt-Bail (Lend-Lease)
Les Belges se sont vendus aux Américains disaient nos amis français. Ils ne sont pas naïfs les Belges. Ce sont les Américains qui se sont vendus aux Belges.
Ces fameux contrats de prêt-bail dont les Belges se méfiaient ont été épluchés à la loupe. Lorsqu'ils ont découvert tout le parti qu'ils pouvaient en tirer, les Belges n'ont pas hésité à faire jouer toutes les clauses du contrat. Le port d'Anvers fut tout simplement loué aux Américains au prix fort. L'usage de l'infrastructure routière itou ! Mesquin direz-vous? Et les péages des autoroutes françaises n'est-ce point mesquin....?
Trêve de plaisanteries! Toujours est-il que lorsque une éminence belge fut dépêchée à Washington, la facture en faveur de la Belgique s'élevait à 500 millions de dollars.
Cette créance ne fut jamais discutée. Au contraire! Notre représentant (le baron Kronacker) fut reçu par le président Truman qui remercia chaleureusement la Belgique et .... étonnant mais véridique.... remis à Kronacker le bâton du maréchal Goering, en ivoire et incrusté de diamants...comme avance sur le remboursement.
- Le projet Manhattan.
Au Congo belge, les Alliés se sont largement approvisionnés en métaux rares... le minerai d'uranium notamment qui servit à fabriquer la bombe atomique. Ces fournitures étaient payées "cash"; pour les Anglais en livres sterling assorties par une clause de couverture/or; pour les Américains en dollars majorés de 15%, la clause or n'étant pas légale aux Etats-Unis.
- Fool's paradise.
Ce bon mot, pour désigner la Belgique, est de Winston Churchill. La Belgique, contrairement aux mesures d'austérité et au dirigisme économique en vigueur en Grande-Bretagne et en France, préféra une politique d'abondance qu'elle jugea plus favorable à la reprise de l'activité générale. Tout cela alla de pair avec quelques mesures autoritaires, généralement conjoncturelles, comme le blocage des prix des produits de premières nécessités.
Nous devrions ajouter que dans ce climat de "liberté organisée", il fut nécessaire de créer un climat de "sécurité sociale". Le moyen qui sembla le meilleur fut celui de la concertation. Pour ne pas nous attarder trop longuement, un seul exemple: le "Pacte de solidarité sociale" toujours en application de nos jours. Je vous en reproduis le préambule : "les travailleurs respectent l'autorité légitime des chefs d'entreprise et mettent leur honneur à exécuter consciencieusement leur travail. Les employeurs respectent la dignité des travailleurs et mettent leur honneur à les traiter avec justice". Beau principe dira-t-on! Ce principe fit naître nombre d'organismes et d'initiatives comme les Commissions paritaires (syndicats/patronats) qui restent au coeur de la concertation sociale sans que l'Etat n'ait à intervenir dans les conflits sociaux.
L'instabilité gouvernementale ? Bof! Elle résulte presque exclusivement de "sensibilités" différentes entre le Nord et le Sud du pays sur des problèmes mineurs. Ces querelles mesquines n'ont guère d'incidence sur la vie économique. Le système électoral à la proportionnelle fera dire aux Belges : "on prend les mêmes et on recommence".
Les belles limousines américaines? La Belgique, sans industrie automobile (hormis les usines d'assemblage), possède un marché très ouvert et concurrentiel. Dans les années 50, pour le prix de la légendaire "traction avant" aux délais de livraison aléatoire, le Belge pouvait acquérir une "belle américaine" clinquante de chrome. De nos jours également (lorsque le dollar est à son plancher) sauf que le coût du carburant, des assurances et taxes calculés sur la puissance moteur, en rend le coût global prohibitif.
Bien cordialement,
Francis. *** / *** |