Tout est toujours dans les livres.
(On aurait pu choisir cette affirmation comme sous-titre à Livres de Guerre.)
Pour tenter de comprendre
comment on écrirait un jour [la| singulière histoire des résistant, il faut lire, relire, ruminer les textes - archives, récits, essais, biographies, ... - qui en parlent, de 1942 à aujourd'hui.
En exergue à son essai, Laurent Douzou, historien spécialiste de la Résistances intérieure, cite Jean-Pierre Vernant, chercheur, enseignant et lui-même résistant :
Relire indéfiniment les textes, en regardant les termes, l'organisation du récit, sa place, les échos internes. Quand on revient sans cesse sur un texte, ou bien les questions qu'on se posait se déplacent, ou bien elles deviennent pertinentes : tout d'un coup, on peut lire le texte en fonction justement de ces questions. On a alors l'impression de mieux comprendre, de voir des choses que d'autres, en les voyant, n'avaient pas mises à la même place, des choses auxquelles d'autres n'avaient pas donné la même importance.
L'historiographie de la Résistance comporte des milliers de titres. Elle s'est constituée à travers des débats, des polémiques, parfois très violents sur fond d'enjeux politiques.
Cette historiographie n'aura cessé d'être tenaillée entre la nécessité de respecter une épopée où l'éthique a joué le premier rôle et l'obligation de mettre à distance et en perspective les événements qui l'ont jalonnée. Comment historiens et acteurs ont-ils composé avec cette double exigence ?
Par cet essai, Laurent Douzou espère combler une lacune : dire l'histoire de l'histoire de la résistance.
RC
TABLE DES MATIERES
Introduction
1. Une histoire soucieuse de son histoire (1940-1944)
- La légende contemporaine et constitutive de l'histoire.
- De la protestation ordinaire à la vision épique.
- Comment écrire sur la Résistance.
- Ce que résister veut dire.
2. Une histoire précocement, activement et officiellement en chantier (1944-1959)
- La naissance d'organismes officiels.
- Un travail de bénédictin mené tambour battant.
- Une tâche étendue à l'échelle nationale.
- Premier bilan et première inflexion (1949-1952).
- La transformation avortée du Comité d'histoire de la Deuxième Guerre mondiale.
3. Les témoins gardent la parole et prennent la plume (1944-1974)
- Le témoignage des acteurs: une urgente nécessité.
- Quel linceul pour les héros ?
- Le témoignage dans tous ses états.
- La mémoire en difficulté.
- Un songe incommunicable.
4. Clio au travail (1944-1978)
- Esquisse d'une première synthèse.
- Une histoire pensée et écrite avec le concours de ses acteurs.
- Lucien Febvre au coeur de la mêlée.
- Quel statut pour 1'histoire de la Résistance ?
- Le travail du Comité d'histoire de la Deuxième Guerre mondiale.
- Les carences et les écueils d'une historiographie foisonnante.
- La primauté réaffirmée des acteurs-témoins et l'amorce d'une professionnalisation de la recherche.
- La mémoire de la Résistance à l'épreuve du présent des années 1970.
5. Une historiographie remise en cause et renouvelée (1978-2002).
- Un enterrement dans la plus stricte intimité.
- Une histoire remise sur le métier.
- Daniel Cordier entre en scène.
- Écrire au confluent de 1 'histoire et de la mémoire.
- Permanences et changements des témoignages.
- Une production universitaire en lente maturation.
- Une approche historienne renouvelée.
6. La fin des héros ?
- L'érosion du souvenir de la Résistance dans la mémoire sociale.
- Un épisode révélateur : la table ronde de
Libération (17 mai 1997)
- Les descendants entrent en scène.
Conclusion.