
4e de couverture
Jim a onze ans lorsque, au lendemain de Pearl Harbor, les Japonais s'emparent de Shanghai. Dans la confusion qui suit la canonnade sur le Yang-tsé, il est séparé de ses parents. Livré à lui même dans la ville coupée du monde, il survit pendant deux mois en s'introduisant dans les villas grandioses des concessions européennes où il se nourrit d'amuse-gueule arrosés d'eau croupie. Recueilli (mais pour quelles raisons ambiguës) par deux marins américains, il est arrêté avec eux et enfermé au camp de Longhua. Une poignée de riz, infesté de charançons qu'il faut manger pour les protéines, une ou deux patates pourries par jour, malaria, dysenterie, tel est son lot. Négligé par ses compatriotes épuisés, exploité par les Américains qui le mêlent à leurs trafics - car on trafique de tout : chaussures dépareillées, raquettes de tennis ou capotes anglaises -, il n'a qu'une idée, survivre, et qu'un objet d'admiration, l'occupant japonais, sa seule protection. D'où son égarement quand, sous les bombardements, le camp est évacué et son contenu misérable jeté sur les routes pour une marche forcée vers le stade olympique de Nantao. C'est là qu'entouré de plusieurs centaines de cadavres, au milieu des gradins sur lesquels s'entassent meubles et tapis volés, Jim verra le grand éclair blanc de la bombe atomique sur Nagasaki, non pas fin de la Seconde Guerre mondiale, mais début de la troisième. Où se réfugier, sinon au camp ? Il y retourne, seul, à travers un paysage de rizières englouties, aux eaux huileuses jonchées d'épaves, de cadavres et de carcasses, figé par un soleil de plomb. Décor halluciné pour un livre cruel et rêveur que Graham Greene dit, avec juste raison, "admirable".
***
J.G. Ballard fut d’abord, dans l’ordre de mes lectures, un excellent écrivain de science fiction. J’ai retrouvé dans ce livre, ce regard sur nous-mêmes, décalé et imaginatif, qui fait l’intérêt du genre. Mais là ce n’est que l'incroyable réalité.
Bonne lecture (ou bon film)
J. P. Ghémard