Dès juin 1940, la presse et l'opinion publique américaine désapprouva l'installation d'un régime autoritaire en France. Les Américains prirent rapidement le parti de cet obscur général qui lançait un appel à la BBC et osait défier à la fois l'Allemagne hitlérienne et le gouvernement de Vichy.
La politique américaine et ses relations avec le régime de Pétain soulevaient de telles controverses aux Etats-Unis que le Secrétaire d'Etat, Hull, excédé, chargea l'historien William Langer, professeur à Harvard, de préparer un rapport objectif sur les relations américaines avec le gouvernement de Vichy depuis juin 1940 jusqu'au débarquement des troupes américaines en Afrique du Nord en novembre 1942.
Il fut entendu que le travail de Langer serait celui d'un historien exempt de parti pris et non celui d'un apologiste. Effectivement Langer reçoit l'accès à toutes les archives qui normalement ne sont mises à la disposition du public que nombreuses années plus tard.
Il n'était pas question de rendre ce rapport public. La presse se déchaîna à nouveau, renforçant dans l'opinion publique que la politique à l'égard de Vichy était loin d'être à l'honneur de la diplomatie américaine. Le Département d'Etat autorisa finalement, en 1947, la publication du rapport qui prit le titre de "Our Vichy Gamble" traduit en Francais "Le Jeu américain à Vichy".
L'ouvrage est une mine de renseignements qui laissent le lecteur tantôt pantois, tantôt perplexe sinon stupéfait tant le "jeu" des diplomates américains fut complexe. Non seulement astreints à naviguer entre un Maréchal louvoyant et des ministres versatiles mais aussi obligés de tenir compte des rivalités, des luttes pour une parcelle de pouvoir, des renversements d'alliance, des tendances collaborationnistes des uns, attentistes des autres, opportunistes des derniers....C'était à Vichy! A Alger, l'imbroglio fut total. Somme toute, par indulgence, on serait tenté de croire que la diplomatie américaine ne s'en tira pas trop mal en s'appuyant, au bon moment, sur tous les "expédients" à portée de main.... en attendant que le trouble-fête jusqu'alors ne vienne mettre de l'ordre dans cet incroyable fatras.
Francis Deleu. |