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Le Dernier des injustes, qui a son origine dans le film du même nom, est le plus extraordinaire témoignage sur la genèse de la "solution finale". Il permet de comprendre jour après jour, quelquefois heure par heure, comment les nazis passent en deux ans de l'expulsion impitoyable des juifs d'Autriche, de Tchécoslovaquie et d'Allemagne, à la mort de masse dans les chambres à gaz.
Benjamin Murmelstein est le personnage central de ce livre, témoin capital qui assista à tout, avant de devenir Président du Conseil Juif du ghetto de
Theresienstadt, créé par Eichmann pour faire croire au monde à la vie heureuse que voulait Hitler pour les juifs qu'il allait assassiner. Rabbin de la communauté juive de Vienne, d'une mémoire et d'une intelligence hors normes, d'une immense culture, d'un caractère d'acier, d'une lucidité et d'une clairvoyance inouïes, jusqu'à deviner et déjouer les mesures atroces projetés par les nazis, Murmelstein dresse un portrait extraordinaire d'Eichmann, qu'il dut fréquenter pendant sept ans : pas du tout l'homme de la "banalité du mal", comme l'a prétendu Hannah Arendt, mais un antisémite d'une cruauté sans frein, voleur et corrompu jusqu'à la moelle. En même temps, Murmelstein se livre à une critique féroce du procès d'Eichmann à Jérusalem, mal préparé, bâclé, où on refusa de le convoquer et de l'entendre. Contraint par la force de coopérer avec les nazis, Murmelstein ne fut en rien un "collaborateur", même si des détenus de Theresienstadt voulurent le faire passer pour tel. Jugé à sa demande par la justice tchèque, il fut acquitté de toutes les calomnies portées contre lui. Avec sa femme et son fils, il s'exila à Rome, sans avoir jamais connu Israël. A sa mort, en 1989, le rabbin de Rome refusa de l'inhumer et de dire pour lui le kaddish, la prière des morts.
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Ce témoignage démontre à quel point on doit se méfier des premiers sentiments en histoire. C’est clair que jusque là Theresienstadt était perçu comme une stratégie nazie faisant croire que les déportés juifs seraient bien traités. Ceci est exact mais incomplet. Murmelstein nous montre à quel point l’instinct de survie, pas seulement le sien, sous la cruauté nazie, ne pouvait en aucun cas affronter de face l’ennemi. Il fallait trouver d’autres moyens et l’embellissement de Theresienstadt a fait partie de ces moyens. Ah que l’histoire est compliquée ! C’est la première chose qui devrait être dite aux étudiants…méfiez-vous des impressions trop simples.
Le film a été primé au festival de Cannes en 2013
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