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Avec cet essai original, Fabrice d'Almeida étudie en profondeur les liens entre la haute société allemande et le nazisme. Dans l'introduction, l'historien précise :
Il fallut attendre 2003 et la publication de la grande thèse de Stephan Malinowski pour lire une étude approfondie sur la place de la noblesse dans les allées du pouvoir, de la naissance de l'empire en 1871 jusqu'à la fin de la Seconde Guerre mondiale. L'auteur démontre avec une précision d'orfèvre non seulement la conversion des avantages des grandes familles mais encore le rôle de laboratoire intellectuel que ce milieu constitua pour l'extrême droite allemande, et comment l'idée national-socialiste était souveraine parmi les opposants de la dernière heure qui tentèrent de tuer Hitler le 20 juillet 1944. Voilà comment ce minutieux travail de recherche a sorti des limbes de l'histoire politique et sociale une catégorie longtemps éminente, indispensable pour saisir le fonctionnement du pouvoir, et cela modifie en profondeur la perception du national-socialisme. (p. 12)
Même si cette dernière affirmation est sans doute un peu excessive mais de bonne guerre chez un chercheur, jeune encore, découvrant un champ peu exploré, son projet est très intéressant, passionnant même,
car le nazisme ne fut pas, tant s'en faut, un simple régime porté par la violence. Ce sont davantage ses méthodes de séduction qui lui ont permis de s'imposer et de durer que son usage de la brutalité. Sans tomber dans la caricature, il faut affirmer haut et fort que la Shoah n'aurait pas été possible sans cette profonde illusion que le régime apportait un mieux à la plus grande partie de la population. Or, pour ce mieux-être, les élites étaient prêtes à sacrifier une partie de la population, les Juifs, en qui elles voyaient une entrave à la réalisation de la communauté nationale parfaite. La destruction physique de cet obstacle était le gage du plus grand bonheur. (p. 14)
L'essai de Fabrice d'Almeida nous aide à comprendre comment l'aristocratie allemande fut attirée et séduite par l'illusion d'une modification profonde de la société,
une brusque fiction d'un changement révolutionnaire devenu en quelques semaines une norme, si profondément intériorisée qu'elle définit de nouvelles règles pour la compétition sociale et l'affirmation de la réussite personnelle. Les exclus de cette mutation ont à peine le temps de pleurer leur déchéance que déjà un torrent de violence les dévore et engendre finalement un massacre dont l'horreur n'avait alors pas été pensable. Là réside l'énigme la plus grande du national-socialisme. La juxtaposition d'une société qui se croit héritière des plus hautes valeurs de la Culture avec le déchaînement d'une barbarie génocidaire.
On saisit tout l'intérêt du fruit des recherches du directeur de l'Institut d'Histoire du Temps Présent appliquées à un champ socio-historique et culturel encore neuf.
RC