Bonjour,

Je n'ai pas pensé à faire partager au forum "LdeG" un fil très intéressant que nous avions eu sur un autre forum au sujet de l'armée allemande en France et de ses évolutions particulières au fil de la guerre.

Pour réparer cette erreur, je vous copie, en le modifiant légèrement, le fil que j'y ai déposé au sujet de ce que j'appelle la "soviétisation" (très) partielle de l'instrument militaire allemand à partir l'automne 1943, en attendant vos réactions et commentaires :

Après avoir fureté sur le site www.lexikon-der-Wehrmacht.de, j'ai réussi à trouver des éléments intéressants sur la création de divisions et de corps d'artillerie allemands en 1943-1945.

Il y aurait eu cinq divisions d'artillerie (alors que j'avais connaissance que d'une, la 18. Artillerie Division) : 18., 309., 310., 311. et 312. Artillerie Divisionen, regroupant plusieurs régiments d'artillerie et autres unités divisionnaires (l'OB donné n'est valable que pour la 18. : trois régiments d'artillerie, une batterie de canons d'assaut, un bataillon de DCA, un bataillon d'observation d'artillerie, un bataillon de fusiliers, une batterie de direction de tir ? - Feuerleit Batterie - et diverses petites unités qu'on retrouve dans toutes les divisions).
Leur durée de vie fut variable : d'août 1943 à juillet 1944 pour la première, de janvier 1944 à janvier 1945 pour la seconde, de novembre 1943 à août 1944 pour les trois dernières.

Par ailleurs, un très grand nombre de corps d'artillerie ont été créés dans les derniers mois de la guerre, ce qui est un élément nouveau pour moi, sur lequel je n'ai encore jamais rien vu de concret :
- trois Heeres Artillerie Korps : 88, 411 et 412.
- treize Volks Artillerie Korps : 166, 388, 401, 402, 403, 404, 405, 406, 407, 408, 409, 410 et 766.

Tous ont été créés entre octobre 1944 et mars 1945. Ils regroupent six groupes d'artillerie renforcés, soit entre 72 et 87 tubes en moyenne (contre 48 pour un régiment d'artillerie divisionnaire et une centaine pour la 18. Artillerie Division, ces chiffres étant des estimations ou un potentiel théorique pour le régiment divisionnaire, qui en compte de facto entre 32 et 54).

On peut faire le lien avec une autre pratique allemande de la fin de la guerre, qui est de renforcer la structure de certains corps blindés.

L'Etat-Major de la 18. Artillerie Division (lui-même issu de la 18. Panzer Division dissoute) forme ainsi celui du Panzerkorps "Grossdeutschland" (a priori) en novembre 1944, composé des Panzergrenadier Divisionen "Grossdeutschland", "Brandenburg" et des Führer Begleit Brigade et Führer Grenadier Brigade.

Le Panzerkorps "Feldherrnhalle" est également créé fin novembre 1944 à partir de l'EM du IV. Panzerkorps et comprend les Panzer Divisionen "Feldherrnhalle" 1 et 2.

Enfin, le Fallschirm-Panzerkorps "Hermann Göring" de la Luftwaffe est également mis sur pied à l'automne 1944.

Ces corps sont atypiques de l'ensemble des autres corps. En effet, les divisions qui les composent comprennent moins d'unités divisionnaires que les divisions normales, et ces unités sont affectées directement au corps en tant que "Korpstruppen". C'est-à-dire que c'est au corps qu'il revient de fournir en appuis logistiques divers, artillerie, Flak, etc, les divisions qui lui sont subordonnnées. Le corps n'est donc plus une entité de commandement opérative auquel on subordonne des éléments divers (d'une division à plusieurs). C'est un ensemble de combat fixe, disposant de ses propres unités et devant en principe combattre en bloc.

La raison de cette modification est évidente : les divisions n'ont plus le temps d'être reformées à 100%. On économise les effectifs en mettant en commun les services divisionnaires (et donc en les allégeant) et on se concentre ainsi sur les unités de combat.

Ce changement porte la marque des méthodes soviétiques, pour qui les divisions (en 1941) ou brigades des corps blindés ou mécanisés (ou d'artillerie d'ailleurs) ne sont pas des entités indépendantes, mais des composantes fixes des corps. Sur le tard de la guerre, les Allemands ont donc adopté plusieurs schémas propres à l'Armée Rouge (divisions et corps d'artillerie, corps blindés fixes), ce qui démontre une légère "soviétisation" de leur instrument de combat.

Il faut cependant noter que les corps d'artillerie ne semblent reprendre que les prérogatives des Artillerie Kommandos et Höheres Artillerie Kommandos (Arko et Harkos), c'est-à-dire les EM de commandement de l'artillerie subordonnée à un corps ou à une armée déjà mis en place en 1940 (il me semble). Pour les divisions d'artillerie, seule la 18. a une vie opérationnelle un peu connue, et il semble qu'elle ait obtenu de bons résultats durant la bataille pour Kiev en novembre-décembre 1943, mais sans suite.

Enfin, il est important de noter que bien que la création des corps blindés susmentionnés obéit à une logique bien définie, ils ne seront guère engagés en bloc, le Panzerkorps "Grossdeutschland" étant ventilé sur toute la partie nord et centre du Front de l'Est, ainsi que dans les Ardennes (pour ses deux brigades devenues divisions Führer Begleit et Führer Grenadier), de même que le Fallschirm-Panzerkorps "Hermann Göring", tandis que le Panzerkorps "Feldherrnhalle" sera envoyé en entier dans la bataille de Budapest et sera détruit après la réduction de la poche le 14 février 1945.

Cordialement,

Loic Bonal

PS : les informations sur les divisions et les corps d'artillerie (à part la 18.) sont à prendre avec des pincettes. Je n'ai pas pu recouper ces informations avec d'autres sites connus pour la qualité de leurs informations. Mais celui-ci étant tout de même un très bon site, il n'y a aucune raison de mettre en doute son contenu.