L'un des intérêts du livre de Thiéry est de donner un éclairage du point de vue allemand sur la grande grève des mineurs déclenchée à Montigny-en-Gohelle, dans le Pas-de-Calais, à la fin du mois de mai 1940.
Les autorités allemandes, c'est-à-dire l'OFK670 du général Niehoff ne traitent pas cette grève comme une action contre les militaires, mais en suivant le droit pénal allemand selon lequel toute personne impliquée dans un mouvement de grève est explicitement passible de sanctions pénales. 273 mineurs seront ainsi internés à la citadelle de Huy, en Belgique - les deux tiers avaient été pris lors de la grande rafle du 6 juin. Finalement, le 23 juillet 1941, 244 seront déportés à Sachshausen, puis éparpillés. En 1945, seul le tiers de ces déportés survit encore dans les camps.
Thiéry en vient à traiter la question classique: La grève est-elle un acte de Résistance ou bien un simple mouvement social de caractère alimentaire et économique. Parmi les pièces au dossier, le fait que le parti communiste clandestin, principal animateur de la grève, tient jusqu'au 21 juin un discours qui n'est pas spécifiquement anti-allemand, mais Thiéry rappelle aussi que parmi les mineurs envoyés à la citadelle de Huy, un peu plus d'un tiers seulement était affiliés au parti communiste.
Le problème vient à mon avis de l'emploi du mot Résistance qui a acquis plus tard une signification qu'il n'avait pas forcément en mai 1941, et l'historien qui traite de cette problématique à ce moment-là risque bien de donner dans l'anachronisme.
Quelque soit le discours du Parti communiste, dans une France assignée à donner 20% de son PIB à l'Allemagne, Cette première dissidence de masse française, qui coûte chaque jour à l'économie travaillant pour le Reich 93000 tonnes de charbon, ne peut pas être simplement qualifiée d'alimentaire.
Emmanuel |