Qui commémorera le renvoi de Laval ? - Site personnel de F. Delpla, Historien 1939-45 - forum "Livres de guerre"
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Edition du 12 décembre 2010 à 22h25

Site personnel de F. Delpla, Historien 1939-45 / François Delpla

 

Qui commémorera le renvoi de Laval ? de françois delpla le dimanche 12 décembre 2010 à 16h01

12 décembre 2010

Lettre d’information n° 74 du site de François Delpla

Chers abonnés,

Après l’inflation du printemps, les publications sur l’an Quarante marquent le pas.

Si le mois d’octobre, sous l’impulsion de Serge Klarsfeld, a vu un certain nombre de débats sur le statut des Juifs (répercutés ici ) et celui de novembre un important colloque orléanais sous la direction d’Antoine Prost , il est à craindre de voir passer à l’as, en ce mois de décembre, le très intéressant épisode du renvoi de Laval par Pétain.

J’ai commis un article sur lui dans le dernier numéro du magazine Histoire(s) de la Dernière guerre , qui poursuit sa route pour la satisfaction de ses lecteurs de plus en plus nombreux. Mon collègue Joël Drogland, qui commente en détail tous les articles depuis le premier numéro, fait à celui-ci un reproche révélateur : la mayonnaise prendrait mal entre le rappel des faits connus (prouvant, ce qui peut être utile, que je n’enfonce pas toujours que des portes fermées !) et des révélations relativement nouvelles (exposées sur mon site depuis 2007, puis dans mon livre sur l’assassinat de Mandel en 2008) ayant trait à une velléité de rupture de l’armistice par Pétain, traduite par un début de mouvement vers Alger le 31 décembre, qui ne survit pas à la Saint-Sylvestre.

« Tout cela est bien compliqué et présente un Pétain très influençable. Nous n’avons pas compris le lien entre les deux événements (...). », écrit Joël. Or le lien s’appelle Hitler. Peut-être aurait-il fallu le souligner plus encore ?

Mais sans doute le colloque d’Orléans (lien ci-dessus), chroniqué par le même auteur, explique-t-il en partie cette incompréhension. On ne lit, dans ce compte rendu de deux jours de riches débats sur la bataille de France et ses suites, qu’une seule fois le mot « Hitler », dans le résumé d’un article de François Cochet : « Le plan Manstein-Guderian n’est adopté que le 13 février (c’est un choix de Hitler qui illustre le processus de décision typique de la dictature par sa rapidité). » Saluons au passage cette attribution à Hitler de la décision du plan permettant la percée de Sedan et la victoire-éclair, même s’il me semble qu’il faille en chercher l’origine plus en amont. Mais ce quasi-silence du colloque (à vérifier lors de la parution des actes complets) sur le décideur qui a déclenché la guerre elle-même, après avoir publié en 1927, et cherché à faire oublier ensuite, un projet d’écrasement expéditif de la France, me semble emblématique d’une limite, encore bien actuelle, de la recherche sur ces événements, quelles que puissent être par ailleurs ses avancées.

Hitler est à la barre, non seulement de la réorientation de l’effort militaire allemand vers l’ouest, après la Pologne et en attendant la Russie, mais de l’occupation de la France : une chose, elle, inattendue, motivée par la seule ténacité churchillienne et, pour cette raison même, supposant un doigté infini. Pour ne prendre qu’un exemple, Hitler cherche à couper l’herbe sous les pieds du général de Gaulle avant même de connaître son appel, puisqu’il dit à Mussolini le matin du 18 juin qu’il faut ménager la flotte et les colonies françaises, sous peine de voir se former un gouvernement dissident en Afrique. Mais puisqu’il a dosé en personne les clauses de l’armistice, il est logique qu’il en surveille au jour le jour l’application : ainsi pousse-t-il Pétain à la faute dans la gare de Montoire, le 24 octobre, le maréchal serrant la main oppressive sans rien obtenir. Puis, reprenant une proposition pétaino-lavalienne de collaboration militaire qu’il avait semblé ne pas entendre, Hitler fait mine de préparer une expédition contre le Tchad gaulliste de concert avec les militaires français. Enfin, lorsque ce projet paraît mûr, donc un état de guerre entre Vichy et l’Angleterre imminent, l’absence de contreparties (libérations de prisonniers, assouplissement de la ligne de démarcation etc.) rend la situation intenable, et inévitable une réaction patriotique de Vichy, symbolisée par le renvoi de Laval, le ministre le plus collaborateur et, en pratique, le chef du gouvernement : c’est alors que Hitler donne le coup de boutoir final, en invitant une nouvelle fois Pétain à s’afficher avec lui en zone nord. Il attend en effet le 12 décembre pour informer Vichy d’une cérémonie nazie préparée de longue main et programmée le 15 : le transfert des cendres de Napoléon II, depuis Vienne, jusqu’aux Invalides. Il somme Pétain d’y paraître et ainsi, en quelque sorte, d’incliner bien bas les drapeaux de l’armée française victorieuse en 1918 devant le nouvel « empereur » européen.

On n’a certes pas la preuve que le renvoi de Laval, officiellement « pour des raisons de politique intérieure », ait été l’effet calculé de ces provocations, mais il n’y a pas d’explication rivale, sauf à voir le Troisième Reich comme un grand bateau ivre : ce qu’enseigne depuis un demi-siècle l’école « fonctionnaliste », avec un succès heureusement mitigé.

Laval, on le sait, va avoir pour successeur l’amiral Darlan à la mi-février, après des semaines agitées où l’ambassadeur Abetz -qui rencontre très souvent Hitler, ce que nous ne savons, grâce à Barbara Lambauer, que depuis une dizaine d’années- exige le rappel de Laval. Or Darlan est pris en main par Abetz dès le 15 décembre... à la faveur du retour des cendres de l’Aiglon (maintenu malgré l’absence de Pétain... et de Hitler), et surtout le 25, jour où le Führer en personne convoque l’amiral dans son train, stationné près de Beauvais. Or ce politicien novice est au moins un marin capable et un chef de flotte obéi : c’est de toute évidence (et un télégramme d’Abetz corrobore le fait) son veto qui rend impossible tout transfert vers Alger et oblige Pétain, influençable ou non, à revenir la queue basse vers l’armistice et la collaboration.

Un nouvel éditorial pointe l’insuffisance criante des références à Hitler, et des efforts pour cerner son jeu, dans les publications récentes sur 1940 : , notamment à partir d’un examen du numéro spécial, depuis peu en ligne, de la Revue Défense nationale sur ces parutions.

J’ai également mis en ligne, directement ou sous forme de liens, divers articles relatifs à mon livre sur Mers el-Kébir :
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Je vous souhaite une fête de lectures !

FD 12 décembre 2010

PS.- Si le message s’affiche mal, retrouvez-le ici :

PS 2.- La sortie du livre de John Lukacs L’Héritage de la Seconde Guerre mondiale, traduit par mes soins sous le contrôle de l’auteur, est prévue pour avril aux éditions F-X de Guibert.

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