Un court extrait du livre de Nay - Une jeunesse française - forum "Livres de guerre"
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Edition du 28 avril 2008 à 12h07

Une jeunesse française / Pierre Péan

En réponse à -4 -3 -2
-1Exactement de Jacques Ghémard

Un "court extrait" du livre de Nay de Jacques Ghémard le dimanche 27 avril 2008 à 20h40

Page 105 et suivantes de "Le noir et le rouge"

Le fameux épisode de la francisque a suscité bien plus de polémiques encore. D'autant que François Mitterrand s'est exposé aux coups de ses adversaires en refusant de faire front.
Un fait est acquis : la francisque lui a été décernée, il l'a dit, en décembre 1943, au titre vague de « représentant des étudiants » qui ne parait correspondre à aucun poste occupé par lui à cette époque, ou auparavant. Reste à préciser ce qu'elle représentait exactement et dans quelles circonstances il en fut le bénéficiaire.
A l'origine, la francisque n'avait pas d'existence légale. Dessinée par un lapidaire de chez Van Cleef, un certain Ehret, ancien officier de cavalerie qui travaillait dans les services de propagande de Philippe Pétain, ce'petit insigne était donné par le vieux Maréchal, au gré de ses humeurs, à ceux qu'il rencontrait et qu'il appréciait. Beaucoup (qui devaient s'en repentir par la suite) étaient prêts aux manoeuvres les plus hardies ou les plus basses pour obtenir le droit d'en parer le revers de leur boutonnière. Si bien qu'il fallut en réglementer le port, ce que fit un décret du 25 août 1942. Un ordre fut créé, dirigé par un conseil dont la première tâche fut d'en établir les statuts. Ce conseil, présidé par le général Bricard, comprenait - outre les membres des cabinets civil et militaire du Maréchal - diverses personnalités, dont Gabriel Jeantet et le journaliste Simon Arbellot'. Il se réunissait chaque mois pour décider des promotions. Deux conditions : avoir pratiqué avant la guerre une « action nationale et sociale » et avoir manifesté depuis un attachement actif à la personne et à l'oeuvre de Philippe Pétain. Simon Arbellot a raconté drôlement 2 comment, lors des réunions de ce conseil, l'amiral Platon, « protestant rigide au cheveu ras et au monocle intransigeant », vaincu de Dunkerque le 4 juin 1940, récusait neuf sur dix des postulants en les qualifiant de « gaullistes », tandis qu'André Lavagne et Jean Jardel, membres du cabinet civil de Pétain, repoussaient toutes les propositions de l'amiral en disant : « C'est un collaborateur, je vote contre. »
A en croire Arbellot, « aussi invraisemblable que cela puisse paraitre, le port de la francisque équivalait à Vichy à une sorte de brevet de Résistance ». Personne n'est obligé de le suivre aussi loin. Mais le petit insigne tricolore distinguait bien les féaux de Pétain de ceux de Pierre Laval.
François Mitterrand se rangeait-il parmi les féaux de Pétain? Voire!
« Tous les cadres du Commissariat aux prisonniers ont reçu la francisque, explique Georges Baud. Le Maréchal, qui aimait les prisonniers, voulait nous remercier de ce que nous faisions pour eux. Il eût été dangereux de la refuser. Mais il n'y eut jamais de remise officielle, ni de réception en notre honneur. Elle me fut décernée en même temps qu'à Henri Guérin, Pierre Join-Lambert, Van Batten, Laffond, Pierft Cotiirsol, et même Maurice Pinot, qui en était bien embêté. » (Ce dernier point n'est pas si sûr puisque Maurice Pinot était entré en personne dans le conseil de l'Ordre de la francisque...) Mais le plus important n'est pas là. L'important, c'est que Georges Baud et ses amis ont été décorés avant la démission de Maurice Pinot, intervenue en janvier 1943. Tandis que François Mitterrand, Pierre Chigot et Jean Védrine l'ont été bien après, à la fin de la même année, alors que la zone sud était occupée de longue date, que le régime de Vichy battait de l'aile et qu'aucune équivoque n'était plus possible.
« Je n'ai jamais su exactement qui m'avait proposé pour la francisque, dit Jean Védrine aujourd'hui. Je ne l'ai pas demandée, on ne m'a pas consulté, on n'a exigé de moi ni serment ni engagement, je ne me suis connu aucun parrain. L'hypothèse la plus vraisemblable est que le Dr Ménétrel a voulu, par cette décoration, manifester son hostilité à la politique de Laval. » Il est vrai que le Dr Ménétrel avait dépanné Jean Védrine et Pierre Chigot au début de 1943, quand ils s'étaient trouvés sans emploi après avoir, eux aussi, démissionné du Commissariat aux prisonniers t.
François Mitterrand avait démissionné également mais il eut, lui, des parrains pour la francisque : son vieil ami Jeantet et Simon Arbellot. Arbellot, qui présente Mitterrand comme un ardent résistant, écrit : « Il savait le patriotisme, allant jusqu'au sacrifice, qui animait le Maréchal et ses amis; il connaissait le drame quotidien qui se jouait chez Pierre Laval, la résistance de ces deux hommes, si différente mais si constante. Il me demanda un jour, à moi et à Gabriel Jeantet, animateur des mouvements de jeunesse, de présenter sa candidature à la francisque. Il fut admis à l'unanimité du conseil de l'Ordre sous le feu approbateur du monocle de l'amiral Platon. »
François Mitterrand ne nie pas ce parrainage' d'un homme qui, en 1966, jugeait encore Pierre Laval résistant. Mais il affirme que la francisque ne lui a jamais été remise... pour la bonne raison qu'il se trouvait alors à Londres. Il est vrai, en tout cas, qu'il n'occupait plus d'emploi officiel à Vichy et consacrait le plus clair de son temps à des activités de Résistance... tout en conservant des liens personnels et amicaux avec quelques membres de l'entourage du Maréchal. Façon de se couvrir? Le communiste Robert Paumier, qui le connut bien (il fut, comme tant d'autres, décoré de la Légion d'honneur en 1982 puis, comme quelques-uns, invité à accompagner en juin 1984 le président en voyage officiel en URSS) tranche : « Mitterrand louvoyait entre la légalité vichyssoise et la Résistance. » Tandis que Philippe Dechartre renchérit : « Mitterrand était vichyste, anti-allemand, très courageux et complètement engagé dans la guerre. » Le futur président de la République portera ensuite sa francisque comme une croix. II esquivera toujours la question, contribuant ainsi à créer, puis à accroître le malaise.
Première station de ce chemin de croix : en avril 1945, lors du congrès constitutif de la Fédération nationale des prisonniers de guerre, une réunion où il joue un rôle décisif. Quand on relit la sténographie de ces séances de congrès, on est frappé de découvrir le professionnalisme et la capacité d'orienter les débats dont il fait preuve. Dès l'ouverture de la séance, le communiste Pierre Verrier (décoré de la Légion d'honneur en 1983) l'apostrophe : « Je vois à la tribune M. Mitterrand. Je serais heureux de voir lever l'hypothèque morale qui pèse sur ce camarade qui a obtenu du temps de Vichy la francisque d'honneur du Maréchal... M. Mitterrand avait peut-être ses raisons, mais je demande que tous les gens qui sont dans ce cas soient passés devant une commission d'épuration afin qu'il n'y ait plus d'équivoque sur leur compte. » François Mitterrand : « J'ai été désigné par le général de Gaulle, qui doit s'y connaître tout de même en hommes pour me confier le poste de secrétaire général aux Prisonniers de guerre parce que je suis celui qui a créé le mouvement de Résistance... Sur le plan du pedigree, Verrier, nous pourrions nous confronter. Lorsque le Général m'a désigné, au moment où c'était dur, où il y avait des risques, parce que enfin, quand je suis parti en novembre 1943 en avion à Alger et quand je suis revenu en février 1944 sur mon petit bateau à travers la Manche, on ne peut pas dire que tout était aisé, le général de Gaulle savait ce qu'il disait. »
Voilà une manière de répondre sans répondre et en utilisant largement un parapluie nommé de Gaulle.
Dix ans plus tard, en décembre 1954, François Mitterrand est ministre de l'Intérieur. C'est le député gaulliste de la Sarthe, Raymond Dronne, qui l'attaque : « Le grand républicain que vous prétendez être a un passé trop fluctuant pour pouvoir inspirer ce sentiment qui ne se commande pas, qui est en quelque sorte un élan instinctif et qui s'appelle la confiance. Je ne vous reproche pas d'avoir arboré successivement la fleur de lys et la francisque d'honneur. » François Mitterrand : « Tout cela est faux. »
Raymond Dronne : « Tout cela est vrai et vous le savez bien. Je constate vos variations, vous avez toujours su orienter votre voile pour profiter des vents dominants. Je suis convaincu que vous vous intéressez beaucoup moins à la France qu'à la carrière de M. Mitterrand. »
Cette fois encore, le jeune ministre dédaigne de s'expliquer. Or, il n'a jamais porté la fleur de lys. A-t-il jamais arboré la francisque ? Pour confondre ses détracteurs, il aurait pu faire la lumière sur les conditions dans lesquelles elle lui a été attribuée. Mais il ne s'y résout pas. Orgueil ? Gêne ? Habileté excessive ? Goût du secret ? Belle indifférence ou trop adroite prudence ? Faux calcul à coup sûr.
Demeure cette certitude : l'homme n'a pas été insensible aux orientations de Vichy et à la séduction du maréchal Pétain. Au point qu'en 1944, lors de la publication du premier numéro de l'Homme libre, journal des anciens prisonniers résistants, ses compagnons durent lui demander de nuancer un article qui montrait beaucoup de mansuétude envers le vieux Maréchal'.
Un an plus tard, envoyé comme observateur au procès Pétain pour le même journal, François Mitterrand produisait des articles ironiques et presque méprisants pour tous : juges, procureurs, témoins. Sauf pour un seul personnage : l'accusé. Ce qui n'était pas sans courage alors!

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