Bonjour,
Albert Speer s'était entièrement voué au jardin de la prison de Spandau. Quand il n'y travaillait pas de ses mains, il dessinait les allées, délimitait les parcelles des légumes, celles des fleurs...
Un beau jour, il décida de parcourir le monde sans quitter le jardin. Il avait calculé qu'il en faisait le tour en 215 pas. Convertissant ses pas en mètres et en kilomètres, il entreprit son voyage. Chaque jour, il notait soigneusement son parcours sur une carte. Aidé des livres de la bibliothèque, il commentait son voyage, mentionnait les détails géographiques et historiques. Pendant ses promenades dans le jardin, il dosait ses efforts en fonctions des difficultés du terrain parcouru. C'est ainsi qu'au fil des mois, il arriva à Prague puis Vienne. Il franchit le Bosphore, traversa la Turquie, arriva à Bagdad. La ligne qu'il traçait sur la carte du monde s'allongeait de semaines en semaines. Il notait dans son agenda "parcouru 15 kilomètres aujourd'hui". Après avoir traversé l'Asie en passant par Téhéran, Delhi, Pékin... il atteignit Vladivostok. A ce stade du voyage - on était en hiver - il interrogea longuement les gardiens soviétiques en leur demandant quelle était l'épaisseur de la neige dans la région ou encore si tel lac de Sibérie était pris par les glaces. C'est important, disait-il, de savoir s'il fallait contourner le lac ou s'il était possible de la traverser et ainsi raccourcir son périple.
Nous pourrions penser qu' Albert Speer était devenu fou. En fait non ! S'il s'était lancé dans ce voyage imaginaire c'était tout simplement pour ne pas devenir fou.
Bien cordialement,
L'onc' Francis et ses p'tites historiettes.
PS. Gardons à l'esprit que derrière les détenus à visage humain se cachaient des monstres du nazisme. |