Beaucoup de bruit pour rien - Présumé Jean Moulin - forum "Livres de guerre"
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Présumé Jean Moulin / Jacques Baynac

 

Beaucoup de bruit pour rien de Nicolas Bernard le mardi 27 mars 2007 à 17h13

Une phrase qui m'est souvent venue à l'esprit à la lecture de Présumé Jean Moulin : "tout ceci est fort intéressant, mais qu'est-ce que ça prouve ?"

Un exemple parmi tant d'autres. Jacques Baynac nous évoque le cas d'un certain Pétridès, marchand d'art proche des milieux collaborateurs, et en contact avec Jean Moulin, à qui il a refilé des toiles afin de lui permettre de bénéficier d'une couverture "marchande" et esthétique à ses activités, en 1942. Et de suggérer que, puisque Moulin connaissait un homme aussi peu digne de confiance, son arrestation pourrait résulter de cette relation, entre autres circonstances. Il ne l'écrit pas, non, mais le lecteur est censé se poser des questions.

Pourtant, est-ce significatif ?

Admettons que Pétridès soit bel et bien la personne proche des milieux collaborateurs décrite par Jacques Baynac à partir d'articles de journaux dont on sait, par ailleurs, avec quelle "rigueur" il les retranscrit (voir l'affaire du Dauphiné libéré). Il a fourni des oeuvres d'art à Jean Moulin, peut-être pour couvrir d'autres activités - si l'on en croit les mémoires d'un protagoniste écrivant bien après les faits ?

Je réponds : oui, et alors ? Pétridès connaissait-il le rôle exact de Moulin dans la Résistance ? Non. Connaissait-il ses pseudos (Rex ou Max) ? Non. A-t-il joué un rôle quelconque dans l'arrestation de Moulin ? Non. Inversement, a-t-il permis à Moulin de bénéficier de renseignements sur les collaborateurs ? Non.

Comment je sais tout cela ? Très simple. Les rapports allemands n'en font pas mention, alors qu'ils n'auraient aucune raison de le couvrir. Moulin n'aurait jamais dévoilé ses fonctions à un inconnu. Et s'il a pu être détecté grâce à Pétridès, pourquoi les Allemands attendent-ils des mois avant de le faire tomber ? Et pourquoi Barbie ne le reconnaît-il qu'au bout de deux jours après son arrestation ? Quant à l'éventuelle aide informative apportée à Moulin, Pétridès s'en serait au moins vanté, et ce n'est pas le cas.

Bref, tout ce qui ressort des recherches de Jacques Baynac, c'est que Pétridès a certainement refilé des toiles à Jean Moulin, peut-être pour couvrir d'autres activités dont il ne pouvait qu'ignorer la teneur véritable.

En d'autres termes, voilà une anecdote à l'intérêt pour ainsi dire nul en ce qui concerne ce que nous savons de Jean Moulin.

C'est précisément ce que je reproche à Jacques Baynac : multiplier les détails plus ou moins hors-sujet pour créer une ambiance propice au mystère, à l'énigme, bref à ce monde fantasmatique du renseignement qui le fascine tant. Un retard bureaucratique devient une désinformation, un trou de mémoire un mensonge, une faute de frappe une manipulation. Le cas Pétridès est symptomatique de ce mode de raisonnement, déjà dénoncé par des historiens vis-à-vis des Secrets de l'Affaire Jean Moulin (un titre révélateur !).

Et l'épisode qui précède cette anecdote, c'est à dire l'analyse d'une lettre sans intérêt écrite par Moulin à une préfecture le 16 octobre 1942, est tout aussi significatif. Le cachet postal y indique en effet la date du... 19 août. Et notre brave enquêteur de consacrer quelques pages à ce qu'il reconnaît être une possible erreur commise par les services postaux, ce qui est somme toute logique et s'avère, à mon avis, certain. Mais cette explication est expédiée en une ligne. Et parce qu'elle ne satisfait point notre amateur de mystères, il lui faut absolument susciter doutes et interrogations dans l'esprit du lecteur, et dénoncer au passage un complot de falsificateurs patentés qui agiraient au nom de... de quoi, d'ailleurs ? De mémoire, il ne me semble pas que Jacques Baynac nous en précise les mobiles.

Tout cela est un peu vain, et très facile. Aligner compulsivement les petits faits sans importance pour donner l'image du travail bien fait et noyer le poisson autour des circonstances ayant amené l'arrestation de Jean Moulin, bref, susciter un tel brouillard rhétorique en guise de plaidoyer, ne saurait suffire à dissimuler ce simple fait : Jacques Baynac ne possède aucune preuve de nature à combattre la thèse selon laquelle c'est bel et bien René Hardy qui a livré la réunion de Caluire.

Une telle manoeuvre de diversion est le propre des partisans de René Hardy, et notamment ce dernier, qui se plaisait à souligner dans ses Derniers mots (Fayard, 1984) la possibilité que d'autres protagonistes aient pu, à leur insu, guider les Allemands chez le Dr. Dugoujon. Ce dernier n'avait-il pas un frère milicien, par exemple ? Certes, mais l'énumération de ces éléments ne saurait constituer une preuve.

Or, les preuves incriminant Hardy existent. Et elles sont accablantes.

Pour résumer, le Présumé Jean Moulin de Jacques Baynac pourrait me faire penser, s'il n'y avait ces remarques venimeuses à l'encontre de divers protagonistes (Edmée Delettraz, Daniel Cordier, etc.), à ce titre d'une pièce de Shakespeare : Beaucoup de bruit pour rien.

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