Bonjour,
Jacques Baumel écrit dans "Résister":"Caluire, c'est probablement ce qui restera de la Résistance quand on aura tout "oublié". A raison sans doute, puisque ce fut une tragédie, un révélateur et un instant capital dont les conséquences allaient bouleverser l'histoire de notre lutte. Caluire, c'est aujourd'hui un mystère, une source de commentaires infinis où se mêlent inextricablement le drame lui-même et ce qu'on peut appeler l'affaire Moulin."
Et, plus loin :"On lit en effet partout que la réunion de Caluire était capitale, puisqu'elle avait pour but de remplacer le général Delestraint arrêté le 9 juin à la station de métro la Muette (...) Ce qu'on dit moins, c'est qu'au fond, cette réunion n'avait pas lieu d'être. Bourdet était assez fin politique pour avoir deviné que Moulin n'était pas venu à cette réunion pour entendre les avis et les propositions de chacun des participants. Moulin avait déjà choisi, comme il en avait le pouvoir, et sans nous avoir bien sûr avertis, les deux remplaçants intérimaires de Delestraint, en l'attente de la décision finale du général de Gaulle. Il s'agissait de Raymond Aubrac pour la zone nord, et du colonel Schwartzfeld pour la zone sud.(...) On touche là à ce qu'on pourrait appeler la responsabilité originelle du drame de Caluire, c'est-à-dire à la lutte sans merci que Frenay et Moulin se sont livrée au sujet de l'Armée secrète et pour son contrôle. C'est au moment où Moulin était parvenu à détacher des Mouvements Unis de Résistance cette armée qui, il faut le rappeler, était composée à 80% d'éléments issus de "Combat", que l'arrestation de Delestraint risquait de tout remettre en jeu." (p.316-316)
J'ai déposé cette extrait un peu long, car en tant qu'ancien secrétaire de "Combat", Jacques Baumel nous propose une vision peu partisane d'un drame dont il fut le témoin indirect et qui concerne et implique peut-être - j'écris bien "peut-être" - certains de ses camarades, cadres du mouvement. Son résumé du "pourquoi" de la réunion convoquée par Jean Moulin chez le docteur Dugoujon me semble, là encore, bien rapporté.
Amicalement,
René Claude |